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lundi 16 février 2015

Mestre des Bestes, Roy des Leus Hullants

C'est un peu un exercice de style pour moi que cette notule, car ce jet d'encre numérique se fait en direct de mon smartphone (certifié fabriqué par des travailleurs pas nés lors de la sortie du premier Watain), ma commune étant frappée d'un embargo franco-français type « agent Orange » sur Internet depuis trois putains de semaines. Avanti !

Il me serait difficile ici de pérorer trois ans sur le génie d'Emperor, sur pourquoi In The Nightside Eclipse et Anthems To The Welkin At Dusk sont toujours l'indétrônable expression d'un black metal sophistiqué (voir verso des anthèmes crépusculaires), car c'est après tout (hey) stupide et vain de vouloir assommer quelqu'un avec une œuvre qu'il ne connaîtrait pas / mal ; aurait découvert à un autre moment / autrement que soi-même. En d'autres termes ces albums - purs manifestes d'art total, ce que d'aucuns appelleraient aussi un « gros fuck » - me sont chers pour de multiples raisons n'ayant pas trait qu'au génie de composition, ni qu'à l'avant-gardisme de leur bestialité intellectualisée, ni qu'à l'intransigeance autistico-artistique d'Ihsahn qui aura su, par icelle, se préserver des éclaboussures des événements. Non, ces disques (plaisir que d'utiliser ce mot) me sont précieux parce qu'ils sont tombés dans ma vie au bon moment, trouvant en moi un réceptacle à cette musique classique d'un nouveau millénaire ou plutôt d'un inframonde insoupçonné. Towards The Pantheon, With Strenght I Burn, Thus Spake The Nightspirit, Inno A Satana, Ye Entrancemperium, Ensorcelled By Khaos... seront émulés pour toujours car la bannière sinistre et puissante que ces pièces convoquent rallie, générations après générations, de nouveaux sujets avides de bruit et de fureur, de sturm et de drang (aspect qui ne pouvait qu'être saisi, et rejaillir puissamment, dans la scène française via Forbidden Site et consorts).

Dyonisos est largué, Apollon azimuté, c'est le mestre des bestes qui mène la charge, sans compassion, sans mercy. Coulé dans son élégant chaos, le black metal sophistiqué qu'Emperor extirpait d'une poigne grêle et adolescente des tréfonds de sa Norvège rurale échappe aux principes admis de l'esthétique ; il demeure une étonnante assertion sonore où le lyrisme le dispute au féroce.


In The Nightside Eclipse and its follow-up Anthems To The Welkin At Dusk (not counting the Reverence EP, which is also a great release adorned with a grandiose version of Emperor's then-biggest "hit") are so dear to my heart. This body of work is not only a relentless manifesto of sophisticated black metal art, it is, to put it simply, the grimmest primal scream ever uttured from Norway's modern youthness as well as a valid art form derided and despised by many, adored by few. Long gone are the turmoils of the past, burning churches and thoughtless murders, as if black metal's decaying corpse begins, at long last, to let its iridescent soul to be seen.


...et toujours :

samedi 26 avril 2014

Contes morbides

Le black metal jugé par les vivants

L'Histoire (avec un grand H comme dans Hellhammer) se fait parfois plus black metal que le black metal et les amateurs d'anecdotes frappantes - les petites histoires faisant la grande - connaissent sûrement celle du Concile cadavérique. Pour des raisons fort éloignées de nos actuels grands problèmes politiques et sociaux, le pauvre pape Formose, déjà mort, sec comme Duff McKagan et rigide comme le cou de Tom Araya, fut exhumé pour répondre d'un crime de trahison. Les accusateurs (la noblesse italienne de la fin du neuvième siècle) lui attribuent un avocat charger de répondre à sa place (sans blague), et après avoir revêtu le cadavre putréfié d'atours pontificaux (« ça lui collait à la peau », oserai-je), décident de lui couper les doigts bénissants et de le jeter dans le Tibre plus habitué à charrier des courtisanes syphilitiques que des papes déterrés. Avant la baignade, ses habits nouvellement passés lui furent arrachés (des bouts de pape venaient avec)... et plouf, s'en fut fini du pauvre Formol - oups, Formose, qui disparut avec son cilice, sa dernière possession qu'on ne put lui ôter car trop enchâssée dans le cadavre. Dire qu'il avait toujours cru qu'il y avait quelque chose après la mort... c'était donc vrai !

Cet événement également connu sous le nom d'Horrible synode est l'un des plus lugubres qu'il me soit donné de connaître dès lors que l'on parle des histoires de l'Histoire, et à coup sûr il a dû être relaté à de nombreuses reprises sur diverses sorties black metal. Marduk, cependant et à mon sens, serait peut-être le meilleur candidat - Monsieur Håkansson étant un féru d'Histoire à prendre au sérieux - pour la raconter à nouveau (surtout depuis que le groupe, grâce à Monsieur Mortuus, s'est paré des atours les plus sinistres qu'il ait jamais connu).

Did you know about the Cadaver synod ? What a strange, utterly bleak story lurking in the darkest corners of History. I won't relate it in details here as a minimal search on the internet will tell everything you should know about this dismal case of a cadaver pope standing a post mortem trial. But come on... can things get more black metal than this ?

samedi 19 avril 2014

Nox nomenclatura

Triton satanique à ventre rouge fan de Morbid Angel découvrant qu'il ne vivra pas assez longtemps pour entendre l'album Z de son groupe fétiche

Je n’ai jamais vu le death metal autrement que comme une démonstration de force brute, mais qui ne doit pas être dépourvue de sens. Un manifeste de puissance (ou volonté de, pour faire écho au philosophe cité à tort et à travers par ceux qui n’ont pas lu icelui). Et si je n’ai jamais été fan de « street death metal » comme je l’appelle, celui qui ne sait parler que de zombies ou de démons, c’est bien à cause de la conception précise que j’en ai. Un cahier des charges, auquel un groupe doit répondre pour remporter l’appel d’offre.

Une dimension spirituelle ouvrant sur des tréfonds (obscurs ou lumineux, là n’est pas la question. Chacun voit minuit à sa porte) que d’autres n’explorent pas, tout occupés à raconter la même invasion de morts-vivants sur dix morceaux trop proches. Pas de méprise – je n’ai rien contre Cannibal Corpse, génial à sa façon et qui symbolise de belle manière ce death sans prise de tête (souvent virtuose instrumentalement). Mais j’attends autre chose du style : une connexion, une résonance – si les guitares de Morbid Angel sont accordées si bas, ce n’est pas seulement par extrémisme musical : c’est bien parce qu’elles s’adressent aux fondations. Morbid Angel n’est pas qu’un groupe qui a mangé du cureton sur ses quatre ou six premiers albums, c’est avant tout la traduction musicale d’un self improvement bien particulier – celui de son guitariste-compositeur et de ses bassistes-chanteurs (Steve Tucker - ne jamais oublier que ce mec, avec Erik Rutan, a sauvé Morbid Angel alors que tout était réuni pour l'enterrement en première classe). J’ai racheté assez récemment Altars of Madness, et décidément, hormis quelques autres grands noms comme Immolation, Brutality parfois, et quelques seconds couteaux pourtant premières lames (Akercocke… écouter, voir et lire), je n’ai jamais trouvé mieux dans ce genre précis et exigeant qui devient pour le coup, avec Morbid Angel en particulier, très, très proche de ce qu'Emperor a pu faire sur Anthems... 

Outre cette profondeur réfléchissante (si. vraiment), le death metal tel que j’aime l’entendre doit aussi participer de l'agenda esthétique de l’extrême : on ne pratique pas un tel style, avec une telle exigence, pour le simple plaisir de faire du bruit (c’est très exactement ce que ni vous ni moi n’arriverons jamais à faire comprendre au profane méprisant. J’ai arrêté deux choses : essayer de faire comprendre au profane méprisant, et essayer d’écouter la musique du profane méprisant. La vie est si simple). Non, cette cacophonie du bizarre relève forcément d’une autre quête, moins triviale – et là, chacun y mettra ce qu’il voudra, mais je suis convaincu qu’une esthétique du chaos existe ici comme ailleurs (peinture notamment), qu’elle est aussi tordue que séduisante, et qu’elle est spécifiquement recherchée, travaillée, étudiée par les groupes de death que j’ai en tête. Un point de convergence majeur, même pas musical mais que je qualifierai « d’intention », avec le black metal - ce cousin machin si loin, si proche. J’omets volontairement de cette notule toute la scène scandinave la plus évidente, dont j’aime particulièrement certains noms – mais elle ne procède pas de la même évolution, n’est pas née dans les mêmes éprouvettes, et possède dans ses chromosomes un ADN foncièrement infusé de rock n’ roll que l’on ne retrouve pas dans le death me(n)tal ici concerné. Cette fameuse nomenclature - une perspective en profondeur finalement - ne s’y retrouve pas.

What should death metal be all about... Everyone of us might offer a different take on such an issue. Well, mine is just mine, but here it is. I strongly believe that potent death metal should be as agressive as thoughtful, explaining why I never really fell for the mass-produced, gorish generic DM. Favorites of mine include first and foremost Morbid Angel, Immolation, Brutality, as well as newer things such as Gojira when it comes to killer tracks such as Backbone (the circle is complete, as we just came back to Morbid Angel with that one !). To make a long statement short, "my" death metal should provoke empowerment by internal monologue, dealing with the strenght (rage ?) to overcome oneself. You won't get that feeling when listening to stories about how to kill a zombie by shoving a broom up his arse into his brains. But listening to Summoning Redemption, or At One With Nothing, that's the way to start the day. That's the fuckin' way, man.

samedi 7 décembre 2013

Inquisition Symphony (ou comment j'ai trouvé un Grand Ancien flottant dans ma baignoire après l'écoute de OVFTM)

Inquisition... Connaissant bien ses nom et logo, je sais trop bien pourquoi je suis longtemps passé à côté de ce groupe. USBM. Pas ma came, et c'est un euphémisme. Un genre typiquement affublé d'une production hyper compressée mais baveuse comme l'encrage de vieux comics, parfois prétentieux comme pas deux (le BM canonique nord-américain n'a pas d'histoire autre que récente - comme le pays dont il émane -, il faut bien compenser et c'est souvent par l'arrogance), régulièrement lo-fi par destination comme pour se faire pardonner son insignifiance lors de l’avènement de la seconde vague... Bref, le visa USBM me fait fuir à quelques exceptions près (Leviathan, ou cette crasseuse scène urbaine à la The Howling Wind qui parvient à extirper Satan des égouts fumants de la Fifth Avenue). Si je rajoute à ça le trip ritualistico-machin-chose dédié aux Grands Anciens dérivant dans le cosmos qui me casse bien les couilles car surreprésenté, Inquisition n'avait vraiment pas ses chances avec moi. Et puis merde, j'ai déjà tellement écouté de bons trucs en « -tion »... En un mot comme en cent, j'avais catalogué Inquisition comme un duo de black metal ricain générique ; dont on passe les boîtiers à cent-à-l'heure dans les bacs sans s’arrêter une seconde. Et surtout sans se demander pourquoi, justement, on ne s'y arrête jamais. La rencontre s'est faite au gré d'errances dans le web profond, là où la lumière ne brille plus. J'ai finalement entendu Inquisition - ça m'a même donné envie de les écouter...

Je me suis procuré Ominous Doctrines Of The Perpetual Mystical Macrocosm (avec sa pochette qui pourrait figurer un boss dans les vieux Contra) et surtout le dernier éjaculat Obscure Verses For The Multiverse. Nom de dieu... J'ai fait trois fois le tour de mon slip petit bateau sans toucher les bords, les amis. C'était tellement bon que j'ai remis ça, et j'ai refait trois fois le tour de vous-savez-quoi dans l'autre sens. Si la musique c'est des maths, à l'évidence celle crachée par Inquisition est régie par des théorèmes non-euclidiens. C'est, pour commencer, un putain de déluge, mes aïeux... Absolument furibard de chez furibard, une violente expectoration de couleurs hors du chromatisme terrestre, qui déferle en un torrent mystique ravagé de spasmes slidés dégueulasses. Ce maelstrom se ventile horriblement d'arpèges saturés interdits, autant de filtres sales et granuleux qui préparent en extemporanéité les assauts suivants de cette odieuse symphonie soufflée par Erich Zann - je parlais de couleurs, mais kaléidoscope halluciné est plus approprié encore.

L'aspect rituel, avéré, est renforcé par le coassement sinistre d'une bête maussade enfantée par Abbath et le gauchiste Rob Darken - plus encore que le son, je vous laisse imaginer la scène célinienne. On pensera globalement, outre la voix et le son de guitare, à la meilleure période d'Immortal (les montagnes russes glacées d'At The Heart Of Winter, cet indétrônable bonhomme de neige), ésotérisme en plus. Inquisition, en termes d'ambiance et par les ténèbres parfois solaires qu'il exsude, se situe là où il veut exister ; cette zone grise entre true black et death rigoriste, celui qui s'écoute aux chandelles et où les baskets montantes n'ont jamais été permises (joyeusetés type Necros Christos, Teitanblood...). Pas flagrante objectivement, la furia cabalistique de Limbonic Art cinglera pourtant l'oreille de l'initié - c'est un ressenti. La consistance des guitares et l'exécution frénétique de ces circonvolutions en mode mineur trahit l'arbre généalogique duquel Inquisition s'est joliment cassé la gueule (le duo a tué sa précédente incarnation colombienne donnant dans le thrash) ; le génotype est complet.

A croire que les habituels passeurs de plats américains (je sais c'est dur), plutôt tièdes comme l'archétype vitrinesque Abigail Williams doté pourtant du même arsenal sur Becoming, ne sont là que pour cacher l'immontrable, le tératogène, l'escamoté... Je n'ai jamais douté qu'il existait un véritable BM américain, mais je n'ai jamais douté non plus le détester, hormis exceptions notoires dont Inquisition fera désormais partie. Du vrai, du très grand black metal qui honore son genre, de l'art absolument dégénéré qui, si je l'avais relativement évité jusqu'à présent, a su venir à moi.

Wow. Maybe I'm late to the game, but I just found out Inquisition were actually great. I thought they were turd just because they're yankees, see how narrow-minded I can be sometimes ? In fact, Inquisition is sooo good that I'm sure I'll exclusively listen to them for the next two weeks or so (not couting the Christmas Carols). Searching for some black metal madness, packed with occultism, rigorism, extremism (and tentacles) ? Well, the quest is over for today. Help yourself and bow to these masters of cosmic destructivism, architecturers of agression.And don't fuck around with Cthulu.

Obscure Verses For The Multiverse (Season Of Mist, 2013)

01 Force Of The Floating Tomb
02 Darkness Flows Towards Unseen Horizons
03 Obscure Verses For The Multiverse
04 Spiritual Plasma Evocation
05 Master Of The Cosmological Black Cauldron
06 Joined By Dark Matter, Repelled By Dark Energy
07 Arrival Of Eons After
08 Inversion Of Ethereal White Stars
09 Infinite Interstellar Genocide
10 Where Darkness is Lord and Death is the Beginning (limited edition bonus track)

samedi 30 novembre 2013

Satyricon exécutionne Limoges

Je n'avais encore jamais vu Satyricon sur scène, c'est chose faite (ma check list se réduit, il sera bientôt temps d'y aller...) grâce à Execution Management, véritable Monsieur Loyal Inc. des Lémovices. M. Wongraven est dans un bon soir car on sait l'élégant inégal, et l'on comprend vite que ça va bûcheronner dur et grave comme dans un discours de François Hollande sur l'inversion de la croix (du chômage). Satyricon... Une toujours féroce bestiole issue des bois de Septentrion, mangeuse de moumines à ses heures, qui tombe parfois sur une formule facile dont elle abuse sur quelques albums mais peut se targuer de ne pas en avoir commis de mauvais. A l'instar de nombreux groupes de sauvageons scandinaves de la légendaire deuxième vague, qui, bien que surpris alternativement à ronronner ou à se réinventer au mépris des dogmes, restent inspirés par un ADN profond et obsidien dont ils ne se départent pas.

Fin de la digression et retour à l'agression : ça enquille sec et dur, ça secoue les sapins comme EDF un lendemain de tempête, tout ça contremaîtrisé avec maestria par M. Wongraven qui n'oublie pas, tout bourgeois du black qu'il est, qu'il vient de là il vient du froid. On se paie donc dans la gueule, servis par une interprétation et un son énormes, des Hvite Krists Død et des Forhekset comme si les pains pleuvaient en une biblique multiplication. Tout ça rehaussé en permanence par le charisme Hugo Boss d'un Satyr venimeux, impérial et dominateur. Particularité notoire de Satyricon, on a beau opiner du chef sur des structures souvent rock sinon binaires, Frost est toujours là, derrière, bête humaine ou de somme, assommoir, montagne hallucinée derrière son kit de cuisine norvégien, passant allègrement de plans à la Phil Rudd à des brutalités tou-pa-tou-pa de derrière les fagots tout en blastant à la 1993 à la noire sans coup férir. Un véritable docteur-ès-avalanches qui tape, tape, tape jusqu'au bout de la nuit. Je ne sais pas si ce mec est autiste, dingue ou prof de math mais dans la catégorie moissonneuse batteuse, il fait du John Deere et j'adore (cette fin de phrase n'est que pure coquetterie).

Maestro parmi les maîtres, Satyr a le génie pour concocter la bonne setlist, ce qui en metal extrême comme ailleurs est pour moi une science exacte - mieux vaut un set floppy mais bien agencé qu'une série de frappes chirurgicales mal placées. Là encore plus Kadhafi (mon idole de petit garçon, mais c'est gênant à expliquer) que George Bush, Satyricon a malmené ses sujets cons pliants au gré de son diktat imparable ; tu en trouveras, lecteur, la litanie sur d'autres chroniques. Sache simplement que si Mother North (qui vire à la Fear Of The Dark, mais c'est un compliment-hommage à mes idoles sans compter qu'on aime tous pousser la chansonnette en pensant à Monica Bråten) fut habilement jetée en pâture au public, elle fut suivie avec à-propos par Fuel For Hatred, un combo comme on n'en fait plus depuis Street Fighter II (le premier évidemment - "The World Warrior". Eh oui, 1991 n'est pas que l'année des Use Your Illusions).

Raiding Europe est un bon titre de tournée, oldskull et surtout bien porté - même si Dans La Tête Yvette eut pu convenir. A voir en ville dans la vieille Europe même pour les pas-fan de Satyricon, l'album. Un concert de plus comme ça, et je me risquerai peut-être à goûter le vin du satyre cornu, tiens. Photo en tête de notule de votre serviteur.

Recently went to an amazing Satyricon gig, or should I say recently witnessed a statement of what black metal shoud be and should stay - thanks to the norwegian wolverine horde. Dark, frosty and punishing forest-scented black metal, meaning honey for the ears. And yes, Mother North is still one of the best black metal song ever spirited, a sonic embodiement of the original darkness oozing from scaldic lands during the nineties.

Le site et le Myspace de Satyricon.

vendredi 17 février 2012

Reich morbide

Le black metal au sens où je l'entends - et comme je l'entends au sens propre - n’est pas fait pour être beau ; d'esthétique il ne connaît que celle du chaos ; invertie et non-euclidienne ; rejetée par nature et par destination. Le black metal est un cadavre qui vit encore, un cancéreux en phase terminale qui ne mourra jamais et qui en a la superbe assurance, parfois la morgue : un éclair méchant au fond de ses prunelles putréfiées nous en donne régulièrement la preuve pour peu qu’on sache le trouver et l'écouter. Le black metal n'a rien d'une statue marmoréenne, laissant cela à ses cousins bien portants que sont le death puissant et victorieux ou le doom séculaire figé dans son hiver ; tout au contraire il est un transi asticoté, abscons et contrefait ; sa chair bleuie n’effraie peut-être plus grand-monde mais continue à provoquer hauts-le-cœur et malaise : vermoulue et spasmatique, le pus qu’elle exècre est pour certains, un nectar. Les repères esthétisants n’ont plus cours, car il leur échappe : les références sont déplacées et le sommet devient le fond comme l’éructe Vorphalack dans l'incantation lugubre qu’est Ceremony of Opposites. La crasse et la pisse maculent son ignoble corps dont la chétivité continue de surprendre – à l'inverse du death metal qui se manifeste dans la démonstration de force ; le black metal cultive le vice et rampe sournois dans la fange qui le nourrit et dans sa plus totale déréliction, il ne se laisse entendre qu’à l'état de glaire auditive telle l’horreur liquide coulée sur MoRT, ainsi régurgitée ponctuellement par certains de ses plus misérables hérauts.

Cet immondice musical n’est pas fait pour être compris et d’ailleurs, n'aime pas à s’expliquer ; restant pantois devant la piteuse littérature prétendument analytique produite actuellement à son envers ; préférant être subi ou apprécié généralement sans milieu ni demi teinte – comme toute forme d’expression extrême il a quelque chose d’une déclaration de guerre intime et en provoquera beaucoup ; dont quelques-uns seulement sauront capituler et s’abîmer dans son adulation (voire sa reproduction) comme je l’ai fait avec Samael, Emperor, AbigorOccultImmortal, Mayhem, Marduk et tant d’autres voici maintenant quelques lunes. Le black metal n’a jamais été musique mais avant, toujours, état d’esprit et survit traîtreusement dans la tête de ceux qui ont su l’accueillir une nuit - il meurt passagèrement mais existe toujours et bien qu’écoutant tant de choses différentes aujourd’hui, avec parfois du soleil et des couleurs, demeure pour moi une silencieuse et bruyante énigme qui continue à se faire, par-delà les années, son propre et sinistre écho. Récemment révélés ; Ondskapt (Arisen From The Ashes), Arckanum (Helvìtismyrkr), Saturnian Mist (Gnostikoi Ha-Shaitan).

Hard to find, these days, your dose of real black metal as you want it to be - amongst masses of uniformly played-and-produced records, though, it still lives. Crude and raw, foul smelling and evil sounding, that's how I love it to be - sometimes horror intertwines itself with an elegant form of cadaveric, hurling beauty and to me, that's what black metal is all about - definitely one of the strangest and strongest forms of artistic expression found on this side of the world.

...et toujours :

samedi 2 avril 2011

Politique d'abord...

...mais musique ensuite, tout de même. Fallen, dernier album en date de Monsieur Bourzoume, est sorti. Pourquoi en parlerais-je alors que d'autres viennent de le faire, et de fort belle façon qui plus est ? La parole à Gulo Gulo, du très conseillé Satan Owes Us Money :

« La batterie fourrage là-bas dans l'établi, les riffs villebrequinent patiemment comme l'on manufacture un opiniâtre meuble en bois tandis qu'ils térèbrent l'oreille en carillonnant à qui mieux mieux, la basse est un matelas de feuilles tombées, la voix claire est d'un vieillard blanchi au sel des années vides réfugié dans la douceur chevrotante de son enfance, la voix râpeuse est courte et brûlée par le froid rencontré tout au bout de la forêt de Filosofem. Burzum en 2011 est, hmm, voyons voir ... niaiseux, médiéval, fruste, artisanal, naturaliste, laborieux (au beau sens), végétal, vermoulu, recru, automnal, élégiaque, placide, bossu, noueux, aigrelet, alpestre ... On a saisi. Saisissant, oui, de paix ; et glaçant quand, sans prévenir, du tour de main intact pour impavidement boucler et friser les riffs magnétiques, du gracile et bucolique fredon, monte le râle coupant du loup, dérangé dans sa montagne. Moque-toi si ça t'amuse de sa barbe filasse, peu lui chaut - mais fais pas chier l'ermite ».

A lire dans son milieu d'origine ici, quant à moi, je suis conquis par Fallen, ne sachant toujours que penser de cette renaissance insolente affichée par Burzum.

Wow... The count is out since two fuckin' little years, and he already graced us with Belus and, well, newly-released Fallen. Ok, our boy isn't what you would call the "guy next door". In fact, he's more like the "guy who forces a knife into the the skull of the guy next door". Whatever... Fallen is indeed a truly pleasant offering, smelling like a stack of automnal wood stored in a long-forgotten shack. Einsatzgruppens are not active anymore, but hey, Fallen really is an album to die for. Or to be murdered while listening to.

...et toujours :

samedi 19 juin 2010

Watain, what else ?


Sworn to the Dark avait fait son effet en 2007 : la sainte-trinité cradoque et peinturlurée d'Uppsala, outre un don certain pour les travaux pratiques (voir l'attirail scénique), avait su policer son metal noir via une profondeur mélodique inédite et l'éloignant, c'est vrai, des cryptes et autres transis parfois monodimensionnels du black metal. Et malgré le fracas des chroniques positives, le consensus n'était pas au rendez-vous. Principal reproche (que je ne partage pas) : un côté Dissection trop prononcé. Et c'est vrai que Watain était alors, comme la femme de Cassavetes, sous influence : difficile de ne pas voir son metal teinté par le négativisme de Jon Nödtveidt lorsque l'on a ouvert pour la tournée Reinkaos et que l'on a, dans le cas de E, tenu la basse et réalisé des artworks pour Dissection.

Arrive Lawless Darkness, et quelle tarte tatin avec lui ! Fin dans sa brutalité, chaotique mais compréhensible, glacial tout en exhalant cette poussière cryptique garantie par le Necromorbus Studio, cet album est à mon avis le vrai tournant de leur carrière. Où se loge sa magie ? Dans cette mélopée constante et bruitiste, contrastée par ses accents heavy metal ? Dans le sempiternel de ses fondations rythmiques, artifice classique du style, agrémentées d'un riffing acéré comme jamais et décliné en de longs mouvements ? De Reaping Death, tuerie norvégienne commise par ces suédois et agrémentée d'un solo slayerien, à Total Death, berceuse dont on doit la prose primesautière à Helmkamp (Angelcorpse), en passant par l'égotique Wolves Curse, Lawless Darkness fait en tout cas ce qu'on lui demande : il ravage l'auditeur comme la syphilis ravageait la peau des femmes d'Henry VIII. Reste à mentionner la dernière piste (j'omets la reprise de Death SS qui jure avec le reste) : Waters of Ain et son ambiance « océan de mercure extraterrestre », distillant une furie peu à peu entamée par l'Entropie dont nous parle Watain depuis son premier album. Ou quinze minutes d'une habile montée en puissance, ponctuée par Carl McCoy de Fields of the Nephilim. On atteint le Beau sans le vouloir, paraît-il : Waters of Ain est le fermoir idéal de l'œuvre - peut-être pas un nouvel Inno A Satana, mais celui de Watain, c'est certain ! J'hésite à émettre un reproche qui concernerait la longueur de l'album, car Lawless Darkness a besoin de prendre son temps pour étendre ses ailes noires et décharnées. Est-il utile de rappeler qu'il s'écoute, comme tout grand album de black metal, au casque et loin du monde ?

Je ne vois pas par quelle magie noire les suédois pourraient pousser cette formule plus loin : Lawless Darkness est l'alpha et l'omega du black metal, en 2010 et pour quelques années à venir. Il faudra faire autre chose, et Watain est assez intelligent pour l'avoir compris au moment où il gravait ce requiem dans la granit du Necromorbus. La couronne de meilleur album black metal de l'année vient d'être ravie (presque) sans effort au nez et à la barbe d'Arckanum, que j'avais pourtant adoubé dans une notule dithyrambique. Enfin, et qualité non négligeable du groupe, Watain a le don comique de faire sortir du bois, à chaque sortie, tous les trous du kulte numériques de France et de Navarre : les forums des « gens qui savent » sont, actuellement, un délice à parcourir.

Sworn to the Dark did sell well, but the Watain guys stand by their old wardrobes and did not change anything as far as their appearance is concerned. Meaning, they still attach dead fuckin’ rats around their skinny necks. Rad, isn’t it ? Fuck, I want one, too. Music-wise, this is a whole other story, and I’m not sure I want to tell it here. Yeah, I’m afraid you’ll have to buy it. What I can say though, ‘cause I hear you insisting on here, is that Watain lost its Dissection-coloured edge characterizing the last album. More accurately, Watain did trade it for its own blades, rediscovering and, well, refining its identity along the way. Sure, they're not dwelling anymore underneath the underground. Sure, this is a bit more harmless, a bit less dirty and dusty. But still it reeks of rotten carrion and still it will blow your ass up ! So although more melodic and thrashier, Lawless Darkness is, I really do believe it, an instant classic. Energized with fist-pumping, heavy metal-inspired chorus and riffage, adorned in a stunning (not shitting you) digipack enhanced with over-the-top sinister artwork – not your classic fuckin’ Gustave Doré rip-off -, Lawless Darkness is a monstrous killing machine, ravaging and destroying everything with its melodic yet hyper-violent brand of black metal. As always, do not believe what you can read everywhere on the net – Watain is making it, without faking it. Now fetch all the rats saying otherwise, tie ‘em by their tails, sing Mütiilation’s “Rattenkönig”, and just eat ‘em up. This is my version of our French “La Souris Verte” song.

Lawless Darkness (Season Of Mist, 2010)

01 Death's Cold Dark

02 Malfeitor
03 Reaping Death
04 Four Thrones
05 Wolves Curse
06 Lawless Darkness
07 Total Funeral
08 Hymn to Qayin
09 Kiss of Death
10 Waters of Ain
11 Chains of Death

Le site et le Myspace de Watain.

samedi 10 avril 2010

...les démons.

Varg Vikernes vient de faire paraître Belus, dernier album qui, s'il est l'anagramme de blues, donne pourtant dans le black metal naturaliste, mélodique et monotone qu'on lui connaît (et en cela pourrait clore une trilogie commencée avec Hvis Lyset Tar Oss et Filosofem). Malgré les récents dires du sieur qui souhaitait s'éloigner du metal, des guitares et du folklore y étant associé (car tout cela, comprenez-vous, ça vient du rock, ça vient du blues... et je vous laisse terminer la réflexion de Varg Vikernes), Belus revient... au metal, aux guitares et au folklore associé. On laissera donc Vikernes à ses paradoxes ; cela ne nous empêche pas d'apprécier Belus qui alterne entre le très bon et le moyen, mais, à tout le moins, le résultat s'avère bien supérieur à ce à quoi je m'attendais. Le son est très bon et j'en ai marre de lire des énormités comme « la production est nulle, on est en 2010 » : le black metal tel que le pratique / conçoit Burzum se satisfait amplement d'une production calamiteuse et d'une batterie qui sonne comme mes casseroles. Et d'ailleurs, on n'est pas en 2010, mais en 1993.

Changement de taille à signaler, qui enlève à Burzum une partie de son identité : la voix, méconnaissable, s'est malheureusement standardisée et un feulement typiquement black metal norvégien, rappelant parfois de vieux Darkthrone, remplace la voix déchirée sans laquelle War ne serait qu'un morceau médiocre. Si Tom G. Warrior, dans l'album de Triptykon, a astucieusement évité la facilité, Varg Vikernes (oubliez le comte, il est mort en prison) s'y vautre en revanche pendant la vingtaine de minutes qui clôt l'album : Morgenrøde et Belus' Tilbakekomst (Konklusjon) sont une tentative de retrouver l'esprit de désolation quasi rituel (basé sur la répétition) qui caractérisait la meilleure époque du musicien, mais virent rapidement à l'auto-parodie chiante - dommage. A l'inverse, le début de l'album est franchement excellent et, reconnaissons-le, l'ambiance païenne et épique (symbolisée par le marteau de forge qui ouvre Belus) nous scotche pour la suite. Bien mieux que ce que j'en attendais, mais peut certainement mieux faire, en somme.

Man, the new Burzum is out (as is Varg Vikernes). The name’s Belus and believe me, this is quite a nasty motherfucker harking back to Burzum’s early naturalism – you’ll think about Filosofem more than once. Of course time has passed and so has Vikernes’ voice : his distinctive and distorted painful shriek isn’t there anymore and Belus sports an average, common black metal singing. After the initial enthusiasm, one would regret the boring, déjà-vu conclusion and hope for even more next time but after all, who would have bet on the new Burzum cd one year ago ?

Le site et le Myspace de Burzum.

dimanche 4 avril 2010

Gods of War (Interview Rotting Christ)

Cette entrée sera l'occasion d'inaugurer une nouvelle catégorie, celle des interviews - il ne coûte rien de demander aux artistes quelques éclaircissements sur leurs ténèbres. Et il ne leur coûte pas plus cher de répondre (sauf à Vreid !). Un petit mail à l'adresse de Sakis Tolis aura suffi et c'est avec une grande cordialité que le chanteur-guitariste-compositeur de Rotting Christ s'est prêté au jeu. Un personnage charismatique et attachant, qui donne du brother à tour de bras dans ses mails, mais surtout un « faiseur » dévoué à son art, qui parle avec passion de Aealo, digne successeur de Theogonia, de son pays et de musique au sens large du terme. Je profite de ce préambule pour le remercier car on peut dire que sa diligence à me répondre fut égale à sa sympathie. Many thanks Sakis - keep on creating. Here's to you !

Sh - Nous entendons beaucoup parler, ces derniers temps, de la situation économique et sociale de ton pays. Y a-t-il un degré de lecture « sociétal » derrière la noirceur de vos morceaux ? Je pense notamment à Primordial, un groupe qui travaille beaucoup ce niveau de lecture pour qui sait lire entre les lignes. Penses-tu avoir à endosser un tel rôle en tant qu'artiste ?

Sa - En tant qu'individu je m'intéresse à la situation politique mondiale, et en tant que citoyen à part entière j'aime à penser que j'ai une opinion qui compte. Et aujourd'hui particulièrement, au sortir de cette crise financière qui a frappé mon pays, je suis de plus en plus actif - c'est de notre qualité de vie qu'il est question. Mais ce n'est pas quelque chose que j'exprime par ma musique car la création artistique est ce qui nous permet d'échapper à tout ceci. Le metal a été inventé pour s'échapper du monde et non pour le changer. Je me sens chanceux d'avoir cette possibilité via mon groupe. Il n'est pas toujours bon de voir les choses trop sérieusement - tôt ou tard on deviendrait fou !

Sh - Parlons musique. Écoutes-tu toujours du black metal « pur et dur », notamment celui de la deuxième vague du genre (dont Rotting Christ est issu) ?

Sa - Absolument. J'écoute toujours les hordes issues de la deuxième génération du black metal et j'essaie de me tenir au courant de ce qu'il se passe sur la scène metal / black metal actuelle. Je continue de me considérer comme faisant partie de l'underground.

Sh - Rotting Christ est né d'une scène à mon sens unique : l'écurie Century Media des années quatre-vingt-dix (Samael, Tiamat, Moonspell, The Gathering...). Es-tu conscient, plus d'une décennie plus tard, de l'importance de cette scène ? Comment expliquer ce parfum occulte, « magique » qui imprègne tous ces grands albums que sont Wildhoney, Ceremony of Opposites, A Dead Poem, Mandylion, Wolfheart (j'ai tendance à y voir un dénominateur commun nommé Waldemar Sorychta) ?

Sa - Je me rends compte, évidemment, de l'importance de cette scène car elle a été annonciatrice de courants qui ont dominé plus tard. Alors certes, des choses auraient pu être faites autrement, mais n'oublions pas que nous étions au milieu des années quatre-vingt-dix... L'époque la plus anti-metal de toute l'histoire de cette musique !

Sh - Rotting Christ est un groupe multi-facettes, qui a fait montre d'une grande diversité stylistique tout en conservant cette patte immédiatement reconnaissable. Cependant penses-tu que le futur peut réserver des initiatives surprenantes, du genre album acoustique ou de reprises ?

Sa - Rotting Christ est d'un tempérament anxieux, toujours en recherche de nouvelles voies à explorer. Je ne sais pas si nous y parvenons mais au moins nous essayons. Chaque album est l'expression du côté le plus sombre de notre âme et par conséquent vous pouvez vous attendre à tout de notre part, tant que nous restons fidèles à nos racines obscures et apocryphes.

Sh - Une question très terre-à-terre : je sais que cela a pu être le cas par le passé, mais vivez-vous, en 2010, de Rotting Christ ?

Sa - Après deux décennies, le travail du groupe nous permet enfin de dégager de quoi vivre mais nous avons malgré tout besoin, de temps à autre, d'un job en parallèle : jouer dans un groupe ne t'apportera pas la sécurité financière. Et en particulier quand ça concerne des personnes comme nous, que je qualifierais de romantiques et d'idéalistes... Ca signifie que nous avons perdu un paquet de thunes dans notre vie mais enfin... l'argent n'est pas l'essentiel, n'est-ce pas ?

Sh - Depuis Theogonia, le son de Rotting Christ s'est fait plus épique et majestueux tout en retrouvant, à mon sens, le côté ténébreux qui caractérisait vos débuts. Penses-tu avoir totalement exploré l'identité actuelle du groupe avec les deux derniers albums, ce qui laisse à penser que le prochain serait le début d'un nouveau cycle (traditionnellement les périodes du groupe sont constituées d'une paire : Triarchy.../A Dead Poem, Sleep of.../Khronos, Genesis/Sanctus Diavolo, Theogonia/Aealo) ?

Sa - Je pense que nous sommes sur la bonne voie. Nous sommes actuellement dans notre troisième période artistique, une période plus influencée par l'histoire antique et qui nous donne ce son un peu plus « ethnique », tout en restant occulte et plus metal que jamais. J'ai l'impression qu'en tant que musiciens, c'est notre meilleure époque. Quant à savoir si, avec Aealo, nous en avons terminé avec cette période... La réponse viendra de mon esprit, dans quelque temps, quand j'aurais commencé à réfléchir à mes angoisses (NdSheol : lorsque la composition du prochain album aura commencé, donc). Pour l'instant je suis plus polarisé sur des aspects plus terre-à-terre, et notamment la préparation de la tournée mondiale.

Sh - J'apprécie beaucoup, sur Aealo, les interventions de l'ensemble Pleiades (ces lamentations traditionnelles quelque peu sinistres). Ces polyphonies me rappellent notamment le travail de Kenji Kawai sur la bande-son de Ghost in the Shell. Connais-tu ce musicien ?

Sa - J'aime découvrir d'autres musiques du monde... Celles qui ne proviennent pas forcément des civilisations connues, mais d'origines plus obscures. Et j'adore apprendre des gens qui créent : c'est pour cela que j'ai intégré le choeur Pleiades à l'album. Cet ensemble polyphonique grec est spécialisé dans les lamentations, un genre qui a ses racines dans la Grèce ancienne. Je crois qu'il existe, sur ce globe, des genres musicaux qui s'accordent bien avec les atmosphères que le dark metal peut créer. Je connais le travail de Kenji Kawai et je l'apprécie beaucoup, même si je n'y vois pas de point commun avec les Pleiades. Peut-être ce feeling polyphonique... mais rien d'autre (NdSheol : c'était donc la question conne de l'interview !).

Sh - Peux-tu m'éclairer sur le processus d'écriture de Rotting Christ, notamment au vu du côté « multi-texturé » des deux derniers albums ? De façon générale, tu commences par les paroles ou la musique ?

Sa - La musique me vient en premier : j'essaie ensuite d'y adapter des paroles. La façon d'écrire est quelque chose d'important pour Rotting Christ, et étant, a fortiori, le seul impliqué dans ce processus, je peux dire que c'est, de façon générale, un aspect important de ma vie. Si je ne créais pas je me sentirais vidé, c'est une profonde dépression qui me guetterait. Voilà pourquoi j'attache tant d'importance au song-writing : parfois je suis tellement obnubilé par mes idées que j'en deviens insomniaque. Je m'implique toujours énormément dans ce rôle, comme ce fut le cas pour le dernier album - tu sais, je me suis vraiment cru au beau milieu d'un champ de bataille pendant un bon bout de temps !

Sh - Quel est le dernier album de metal que tu aies adoré (et que tu écoutes encore) ?

Sa - J'ai beaucoup aimé le dernier Burzum... Belus... Un album vraiment old-school.

Sh - Le nom Rotting Christ dissimule bien plus de sens qu'il n'y parait : c'est un véritable sigillé, doublé d'une profession de foi contre les dogmes préétablis et l'étroitesse d'esprit à laquelle est confrontée la scène dite « extrême ». Mais c'est aussi - évidemment - une épine dans le pied du groupe (cf le problème avec Dave Mustaine). N'est-ce pas un suicide commercial permanent que de s'appeler ainsi ? Rotting Christ a-t-il jamais pensé, au fil de sa longue carrière, à se débaptiser ?

Sa - Il est évident que c'est une épine dans notre pied, un patronyme qui nous a fermé beaucoup de portes... C'est peut-être un suicide commercial mais sincèrement « mieux vaut régner en enfer que servir au paradis » (NdSheol : une citation de Milton). C'est le metal mon frère et nos rêves n'ont rien à voir avec une externalisation de notre ego. Metal on metal !

Sakis, au nom de Rotting Christ.

Sh - We recently heard a lot, in the news, about Greece's economico-social situation. Is there a level of social-consciousness beneath the darkness of your songs ? I'm thinking about Primordial, a band which makes statements about our world's state for whom can read between the lines. Do you believe you have that kind of role, as an artist ?

Sa - As an individual, I am really into these political situations that take part worldwide. I am an active society member and I want to believe that I have an opinion for everything that matters. Especially now, after the current financial crisis that hit our country I am getting more and more active, it simply has to do with the quality of our life. But it's something that I never express through my music cause creating art is the only way to escape from all that happens everyday. Metal was invented for this and not to change the world. I feel lucky that I have this opportunity with my band. It is not that good to see all things so serious. Sooner or later you will get crazy !

Sh - Let the music do the talking now. Do you still listen to pure black metal, such as the second-wave black metal from which you rose ?


Sa - Of course I do still listen to all those second generation Black Metal hordes and I am trying to follow as much as possible the current metal scene and Black Metal releases. I still consider myself as a part of underground community.


Sh - Rotting Christ is born of a magical, occult scene : the Century Media stable, with great artists such as Samael, Tiamat, Moonspell, The Gathering... Are you fully aware, more than a decade later, of the importance of that scene ? How would you explain that magic / scent of occultism which infused great records such as Wildhoney, Ceremony of Opposites, A Dead Poem, Mandylion... (I can see a common factor named Waldemar Sorychta) ?


Sa - Of course I am aware of the importance of the scene back then as it was the precursor of some styles that dominated later on. Ok, some things could have been different but do not forget that we were in the middle of 90's... The most anti metal era of Metal history !


Sh - Rotting Christ is a multi-dimensional band, stylistically speaking, which always managed to keep its sound and identity. However, do you think the future can hold some particular initiatives, such as an acoustic album (that would be a blast - don't know why but I'm sure about it), or a cover-album ?


Sa - Rotting Christ is an anxious band, always seeking for new directions. I do not know if we manage to do it but at least we try. Every album is an expression of the darkest side of our soul and you can expect everything from us in the future as long as it is faithful to our dark and apocryphal roots... because Rotting Christ will never sell out.


Sh - A very down-to-earth question : do you make a living out of Rotting Christ ? I know it had been the case in the past but what about now ?


Sa - Finally after two decades we manage to earn our living by playing in a band but even now we are forced to have some alternative jobs cause playing in a band can not ensure you anything financially. Especially when you are persons like we are, which I would call romantic and idealists... That means that we have lost a lot of money in our life - but money is not everything in this world. Don't you think ?


Sh - I believe that since Theogonia, Rotting Christ' sound shows a newfound deepness / epic majesty, while rediscovering its initial blackness. Do you think you have fully explored, with the last two albums, the current identity of Rotting Christ ? Will the next album be the beginning of a new cycle (as I believe Rotting Christ's periods are often defined by pairs of album : Triarchy...&A Dead Poem, Sleep of...&Khronos, Genesis&Sanctus Diavolo, Theogonia&Aealo) ?

Sa - I think that we are in the right way. We are currently crossing our third period as a band, a period more influenced by ancient history and making the band sounding a little bit ethnic but still occult and more Metal than ever. I feel this is the best season we are covering, as a band. I do not know if with Aealo we ended up this period... My soul will say the truth in some time, when I will start philosophize my anxieties. For the moment I am more concentrated in down-to-earth things like preparing our worldwide tour.


Sh - I am really enjoying the eerie, beautiful lamentations performed by the Pleiades choir throughout Aealo ! I'd like to point out that these polyphonies remind me some of Kenji Kawai's work (specifically the Ghost in the Shell soundtrack). Do you know him / his music ?


Sa - I am really into searching ethnic music... Music not coming from knowed-civilisations but from more « underground » places. I love to learn from people that create. This is the reason why I did incorporate the Pleiades. This Greek polyphonic choir is specialized in lament songs that have their musical roots back in ancient Greek. I think there is music around this globe that fits well with the dark atmosphere that Dark Metal can create. I am aware of Kenji Kawai's work and find it great even if I think that it doesn't sound like Pleiades. Maybe the polyphonic feeling... Nothing else...


Sh - What about the songwriting process in Rotting Christ, especially given the multilayered textures featured in your last albums ? And what comes first - the music or the lyrics ?


Sa - Music comes first and I am trying to adapt the lyrics to it. Song-writing process is an important thing in Rotting Christ, and being the only one involved in it, I can say that it is an overall important part of my life. If I was not creating I would feel empty and would fall in a deep depression. So I take this process really seriously and some ideas are stuck so much in my mind that I hardly can sleep for a long period of time. I am always getting into that role very deeply ; as I did with the last album - thinking for a long time that I was in the middle of a battlefield. Man...I believed it !!!


Sh - What is the last metal album you really loved and still listen to ?


Sa - I liked Burzum's last album... Belus... A really oldschool outcome.

Sh - The name Rotting Christ is more to the eyes than it seems : it is a true sigil, a statement against dogmas and narrow-mindedness. However it can also be a thorn in your side (we know about the, well, Mustaine problem). Isn't that name a permanent commercial suicide ? Have you ever thought, in Rotting Christ's extended career, about changing your band's name ?


Sa - Of course it is a thorn in our side which has closed many doors for us... It might be a commercial suicide but to be honest we prefer to rule in hell instead of serve in heaven. This is Metal bro, and our dreams have nothing to do with any ego externalisation. Metal on Metal !
Sakis, on behalf of Rotting Christ.


Aealo (Season of Mist, 2010)

01 Aealo
02 Eon Aenaos
03 Demonon Vrosis
04 Noctis Era
05 dub-sag-ta-ke
06 Fire Death and Fear
07 Nekron Iahes...
08 ...Pir Threontai
09 Thou Art Lord
10 Santa Muerte
11 Orders from the Dead

Le site et le Myspace de Rotting Christ.

...et toujours :
Hellénique ta mère

vendredi 4 septembre 2009

Sous la lune exactement

J'avais quitté Arckanum voici bien longtemps, le dernier album connu de mes sévices étant Kostogher. A la faveur de plusieurs chroniques dithyrambiques, je renoue avec le troll Shamaatae, non sans surprise : ÞÞÞÞÞÞÞÞÞÞÞ est un disque terriblement efficace et étonnamment « compact », quand on connait Fran Marder - que je vénère, réécoutez Trulmælder - et Kostogher, deux œuvres quelque peu foutraques (et donc charmantes). Shamaatae me donne l'impression d'avoir « concentré » son art, pour un résultat plus dense et percutant que jamais. Sur l'autel de l'efficacité on a sacrifié cependant un peu de l'atmosphère Nature & Découvertes : plus de bruitages dans la forêt, ni de chouettes et autres hiboux en guest-star (mieux traités chez Arckanum que chez Satyricon), encore moins de violoniste perdue au pied d'un chêne solitaire, mais un bon sang de déluge de vrai black metal, cette bête furieuse et désespérée.

Un black metal, comme toujours, éminemment « nocturne » - les amateurs du musicien me comprendront. Les riffs sont gorgés de feeling, restent cradingues en évitant le côté nécro désormais un peu factice, et savent « thrashouiller » quand il le faut (Shamaatae a découvert le palm muting). Toujours un bon point pour moi, quand ça thrashouille... Autre point en faveur de ÞÞÞÞÞÞÞÞÞÞÞ : sa production puissante et massive, lorgnant un peu sur le son tout en contrastes de chaud et de froid à la Necromorbus (on notera d'ailleurs une petite coloration Watain, voire Dissection sur certains passages), et qui finit d'asséner le propos like a fist in the face of... Le masque du troll est tombé : ce qui se cachait derrière est encore plus laid, encore meilleur. Sans hésitation l'album black metal du moment, un gribouillis musical monochrome, craché à la gueule de qui voudra bien l'avaler. J'ouvre grand.

I do love Arckanum’s first works since a long fucking time. In fact, when a teenager, I was especially crazy with Fran Marder, an obscure and obdurate black metal record blessed with a wooden, mysterious atmosphere – fuck, listening to it is like smelling some rotten mushrooms, or eating an old, soaked piece of bark fallen from a gnarly oak. Well, believe it or not, but current release ÞÞÞÞÞÞÞÞÞÞÞ is such a motherfuckin’ killer of an album ! Although a bit less atmospheric, ÞÞÞÞÞÞÞÞÞÞÞ is a sonic blitzkrieg more sharpened and lethal than ever before – to put it simply, more metal ! Man, Shamaatae even discovered what palm-muting is on that one. Blast it on a boombox on a hot summer afternoon and you’ll see what were Dark Angel meaning with the title of their second album.

ÞÞÞÞÞÞÞÞÞÞÞ (Debemur Morti Productions, 2009)

01 Þórhati
02 Þann Svartís
03 Þyrpas Ulfar
04 Þursvitnir
05 Þyrstr
06 Þjóbaugvittr
07 Þjazagaldr
08 Þá Kómu Niflstormum
09 Þrúðkyn
10 Þríandi
11 Þyteitr

Le site et le Myspace d'Arckanum.

samedi 18 juillet 2009

Transport(é) en commun

Photo : votre serviteur

Depuis quelque temps, la vie sociale (et la fin de celle de ma voiture) m'oblige à emprunter régulièrement les transports en commun. Difficile de cultiver sa bulle misanthropique coincé entre un vieil arsouille au souffle méphitique et une mère de famille flanquée de sa bruyante progéniture - simple exemple situationniste. Par chance, mais aussi par hasard, il se trouvera de temps en temps une jolie brunette ne demandant - ou pas - qu'à être matée. Ce que je ferai : je ne suis pas contrariant. Mais difficile quoi qu'il en soit de se garder un espace personnel dans un endroit où, par définition, cela n'existe pas. Difficile - mais néanmoins possible, notamment grâce à Emperor. Tenez, rien que le cri trafiqué au début de Towards The Pantheon : il est tellement long qu'à lui seul il vous passe deux arrêts.

J'ai près d'une centaine d'albums sur mon lecteur, mais décidément, il m'est difficile de mettre autre chose qu'In The Nightside Eclipse dans le bus : une ellipse salvatrice. Le feulement  abyssal d'Ihsahn, l'hystérie des guitares et la mélopée des claviers remplissent toujours leur office, confirmant que si Anthems... reste l'un des meilleurs albums metal à être jamais sorti, In The Nightside Eclipse demeure indétrônable lorsqu'il est question de pur black metal. Ça fait du bien, parfois, de se reconfirmer certaines choses. Matin ou soir, bus plein ou bus vide, tout cela n'a finalement guère d'importance dès lors que j'ai les norvégiens « dans les oreilles ».

Even today, after more than fourteen motherfucking years, Towards The Pantheon still makes the hair on the back of my neck stand up. I just can’t get enough of it, especially when Ihsahn’s insane scream kicks in (yeah I know, there are in fact two screams mixed up into one. Don’t go ruining my enthusiasm though, you lowlife Emperor’s subject). I especially love listening to In The Nightside Eclipse in the bus, while peering at a young mother’s opulent, pristine breast. Yeah, maybe I’m just a short-haired black metal pig after all – and I do believe it sometimes saves me from everyday’s void.

...et toujours :

L'Empereur Contre-Attaque

mardi 25 décembre 2007

De Mysteriis Dom Sapinus (Merry Mayhem)

Je n'ai pas l'habitude, dans ces colonnes, de rédiger des comptes-rendus de concerts. Primo, je n'ai jamais été fan de l'exercice. Une hérésie pour certains qui ne conçoivent, ne consomment le metal que comme une musique live avant tout - une vision quelque peu limitative à mon sens. Rajoutons à ce peu de motivation le fait que je ne goûte que très peu au public dit « metal » de base (on n'est pas prêt de me voir à un festival par exemple, synonyme pour moi d'enfer sur terre), et l'enfer est dans le sac. Néanmoins ce manque d'intérêt n'est pas une règle : j'en « fais » tout de même régulièrement quelques-uns, et la récente et classieuse date d'Anathema à laquelle j'ai eu l'honneur d'assister (et de vexer Jamie Cavanagh, mais ceci est une autre histoire) aurait méritée quelques lignes ici - une notule qui restera finalement lettre-morte.

Mais... Mais j'ai vu Mayhem il y a quelques jours, en pleine Gaule Centrale, pour cette tournée Ordo Ad Chao placée sous le signe de l'outrance costumière. Une expérience. Comme d'habitude, je n'ai pas eu une envie folle de raconter la soirée ici : après tout quoi de plus éloigné qu'un concert et son bête et méchant compte-rendu « papier » ? Cependant que je digérais le choc, ma volonté de ne rien en faire vacillait. J'attendais un signe : et pourquoi pas, pour une fois ? Après tout, seuls Obituary et Samael ont eu droit à un article live dans ces colonnes. Pourquoi pas Mayhem, qui représente tant de choses pour votre serviteur ? Ce signe arriva par deux fois. Premièrement, j'ai rencontré le Père Noël en ville - c'était une femme. Tout se perd. « Avec de gros seins, en plus », fis-je remarquer d'un air porcin à ma copine. Je me suis dit, « c'est bon, la mère Noëlle et / ou sa poitrine lollobrigidienne - c'était ça ton signe. Fais-le ce report ». Un second signe, absolument évident, me fut envoyé un peu plus tard dans la journée : fouillant dans le bric-à-bacs d'un disquaire qui se prétend agitateur kulturel (passez-moi mon revolver), je tombe sur le dernier Mütiilation (à la FNUCK, véridique !). Association d'idées, chaise roulante de Meyhna'ch sur Black Millenium, chaise roulante d'Attila sur quelques dates de cette tournée Deconsecrate Europe... Je n'avais plus le choix. Seulement un devoir : celui de servir le lecteur. Et tel Charles Dexter Ward, je prends maintenant mon stylo d'une main tremblante, pour livrer les mystérieux et sataniques secrets déflorés en cette funeste soirée. On passera vite sur l'insipide Pantheon I (ou plutôt, Pantheon aie aie aie, pour la brunette violoniste qui rejoindra Mayhem sur deux morceaux).

Je m'attendais à tout au niveau visuel, ayant eu vent des facéties de Monsieur Csihar. Je m'attendais à tout.... sauf à ça ! Attila s'est pointé déguisé en putain de sapin de Noël ! Avec des guirlandes électriques et tout le toutim ! C'était bien fait et l'on ne voyait rien de lui, que ce roi des forêts probablement scié par Blasphemer un peu plus tôt au bord de la route. Ça clignotait, c'était enguirlandé, je suis sûr qu'un petit renne devait être suspendu quelque part - la totale. Jusqu'à son sommet, occupé par une boule plus grosse que les autres (on croit rêver). Effet garanti de l'apparition : les trois compères assénaient déjà le premier titre depuis un moment lorsque l'on vît le conifère se mouvoir lentement vers le centre de la scène et entamer une sinistre mélopée, rehaussée d'un écho avec encore plus de réverb' qu'un chorus de Def Leppard en 1987. Surréaliste, et après menue réflexion (n'allons pas nous faire mal), j'oserais même dire « dadaïste ». Alors qu'en dire ? Eh bien... passé la surprise, c'était « glauque » de voir ce végétal, traditionnellement associé à un moment festif, éructer les morceaux du dernier album et expectorer sans hargne, mais avec une colère froide et terrifiante, les infernales litanies mayhemiques (truth ?). Ordo Ad Chao fut transfiguré par son interprétation, si bien que j'ai redécouvert cet album étrange - et au sujet duquel je n'ai point changé mon avis d'un iota. Le son du groupe était très correct, avec une prédominance de la rythmique au détriment des mélodies peu gênante vu la physionomie de la dernière œuvre. De toutes façons le père fouettard de Budapest était l'attraction principale - sa présence capte, magnétise, accroche. Je n'avais jamais vu Attila auparavant (ni Mayhem), mais une chose est sûre, c'est qu'au niveau vocal il est unique et, c'est vrai, assez effrayant. C'est aussi simple que cela... Et pourtant, le public n'aura rien « vu » de lui : seulement ce déguisement forestier. La voix, caractérisée par ce timbre effroyable et séculaire, est conforme à sa légende - sans équivalent ou en tout cas pas dans le black metal. Bien sûr, la réverb' parachevait son impact et l'effet, mais quel malaise tout de même...

Le coup du sapin de Noël aura ses détracteurs, c'est certain, car la frontière entre le « bon » effet et le ridicule est ténue - on touche là du doigt l'un des problèmes majeurs du metal, tous styles confondus, celui qui pousse à répondre par un laconique « du rock » quand on se voit demander ce que l'on écoute. Reste que j'ai adoré (quelle gageure que de maintenir une telle présence dans cet accoutrement), et cela pour plusieurs raisons que je ne détaillerai pas - il serait question de contre-pied, d'attitude, de recul, du privilège de l'âge, et d'un sens de l'autodérision rafraîchissant dans une scène ou rangers, ceinturons cloutés et bras croisés résument trop souvent, justement, « l'attitude ». Et dire que certains autoproclamés experts à la petite semaine voudraient donner, à l'heure du goûter, des leçons de black metal à Mayhem, Satyricon ou Darkthrone... Le black metal n'a jamais été défini par sa musique, mais par son esprit d'opposition. Une opposition à ce qui se trouve en face, fût-ce des ados se donnant un air trop sérieux avec... rangers, ceinturons cloutés et bras croisés. En l'occurrence, le black metal, ramené depuis quelques années par ses parangons les plus célèbres à ses racines punk et rock n' roll (vous reprendrez bien un peu de Motörhead et de Bathory ?), a retrouvé son essence et peut-être sa vocation première : l'entertainment nihiliste. Être black metal en 2007 - et Mayhem est le black metal -, c'est peut-être, effectivement, se ramener sur scène accoutré en gros lapin rose (rabbit death's curse ?) ou en proxo « bling-bling » entouré de pétasses. Une substantifique moelle que certains ont su isoler et extraire plus tôt que les autres - on pense très fort à Impaled Nazarene, à l'oublié Demoniac ou à Deströyer 666 ! Et on remarque au passage que le patronyme complet de la horde, The True Mayhem, fait aussi et malicieusement office de doigt d'honneur adressé aux esprits étroits.

J'en reviens à cette soirée du 22 décembre après cette digression : beaucoup ont du rater Mayhem sur cette date... Censés tenir le haut de l'affiche après quatre premières parties (Pantheon I, Aabsinthe, Kronos et The Old Dead Tree), les norvégiens ont finalement joué en deuxième position pour regagner leurs pénates durant la nuit. En pâtira la set-list, abrégée pour ne durer qu'une heure durant laquelle furent moulinés Ordo Ad Chao et quelques classiques (dont Freezing Moon bien sûr, annoncée superbement et agrémentée d'un solo simpliste et bien vu). Les morceaux de l'ère Maniac y gagnent au change : une répugnante version de To Daimonion fut délivrée par le sapin chantant. Un concert trop court mais intense, ponctué de morceaux de bravoure (ce monstrueux et impromptu break qui laisse Attila psalmodier d'une voix blanche « odium humani generis »), et pas forcément brutal mais tellement... black metal. Moins sauvage que lorsque mené par Maniac, Mayhem est (re)devenu plus vicieux, plus finaud et à nouveau dérangeant. Pas mal pour un groupe passé à la postérité pour toutes les mauvaises raisons du monde, et englué dans une caricaturale légende depuis trop d'années ! Une chose est sûre : la frange dérangée ( infinitésimale) du public de Mayhem semble ne goûter que très peu aux fantaisies esthétiques du moment, et Attila prend bien plus de risques, devant les puristes-true-du-kvlt, à jouer en gros lapin qu'en dictateur chaplinesque (déguisement auquel je suis content d'avoir échappé, pas pour de stupides raisons, mais simplement parce que ce qui a déjà été fait par d'autres n'est plus à faire). Je renvoie le lecteur intéressé à une passionnante interview donnée pour le Terrorizer d'avril 2007, dans laquelle Necrobutcher expliquait que la mort de Dimebag Darrell avait vraiment eue une résonance dans le camp Mayhem (« on joue devant un public et dans une scène qui rend cela possible, c'est un fait, je cherche des yeux le canon d'un éventuel flingue sur certaines dates américaines »).

...Mais ce sapin, putain, ce sapin qui vouait Noël aux gémonies pendant tous les morceaux avec cette voix de ténor décomposé... « I would like to dedicate that show to all the trees that we human scum cut down for fuckin' christmas... fuck him... fuck christmas... fuck him... ». Je rappelle que c'était le traditionnel festival de Noël de Execution Management - au fait on ne le dira jamais assez mais... bravo les gars. Et je signale aussi que Mayhem ne s'en prend pas forcément au christianisme sur scène (vous parlez d'une ambulance... ça n'est plus subversif depuis longtemps, mais est-ce même encore drôle ?), mais à chacune des grandes religions révélées. Et y'a pas à dire, dans l'état actuel des choses, c'est plus dangereux de brûler certains symboles que d'autres - je n'avancerai pas plus sur ce terrain miné. Reste le plus important pour conclure : la musique de Mayhem exhale réellement quelque chose, et quand Attila souffle, dans un murmure d'infrabasses, « dedicated to the trees », on fait comme les interlocuteurs de Lino Ventura dans ses films : on ferme sa gueule, on écoute. Et on se dit qu'en effet, les arbres de la forêt voisine doivent l'entendre.

Well I am not what you can call a gig-addict. But attending a Mayhem’s performance is always an event, isn’ it ? So here I was and man, total mindfucking madness it was. The boys were headlining some Christmas Fest (wtf ?!?), or supposed to (the running order was modified on the last minute). Musically Mayhem ripped the place apart but hey, for fuck’s sake, fuckin’ Attila was dressed as a Christmas tree for the whole gig !!! Well, it would be more accurate to say he was entangled, more than disguised, in a fuckin’ firtree ! Of course the thingy was complete, adorned with fairy lights and coloured bulbs and, therefore, powered by electricity. Fuck me ! I swear on your sister’s chastity this is absolutely fuckin’ true ! I was more expecting a pink rabbit or a greasy pimp, like on the rest of the tour, but hey, Christmas it was, wasn’t it ? The assistance was divided, pros and cons – what I do know is that what Attila did that night was truly black metal in the most twisted kind of way – isn’t this music about shocking people off and breaking every rule ? That bein’ said, I wish all of you sickfucks a merry Christmas and a happy Mayhem.

Le site et le Myspace de Mayhem.

...et toujours :
Un nouveau suicide chez Mayhem