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jeudi 20 octobre 2011

La monstrueuse parade

On n’empêchera jamais un véritable artiste de s’exprimer, et un véritable artiste trouvera toujours le moyen de s’exprimer – par quelque biais que ce soit. Enlevez-lui sa guitare, il écrira des poèmes. Piquez-lui papier et crayon et il prendra des photos. Privez-le d'appareil photo ; il fera des films avec son smartphone. Enlevez-lui son mobile et foutez-le au fond d’une grotte avec son ombre pour seule compagne (Mesrine !), il vous réinventera l’art pariétal : c'est comme çaNikki Sixx est bien de cette race-là, et c’est ce qui le sauve depuis toujours ; validant et entretenant constamment son statut de diseur, de raconteur et de tritureur de la pâte humaine au-delà des aspects parfois détestable qu’il peut avoir.

Oui, son besoin compulsif de dire, de montrer, de faire (souvent avec toute la mégalomanie égocentrique qu’on lui connait) est la preuve constante que le gars ne vit que pour s’exprimer, d’une façon ou d’une autre… Sixx serait resté un beauf d’Idaho (au lieu de devenir un beauf d’Hollywood) que vous l’auriez trouvé au bord d’une rivière, à construire des moulins à eau en allumettes entre deux parties de pêche avinée – Herta style. Oui, c’est ce qui le sauve, et c’est à mon sens la seule explication à sa survie (au moins artistique) : survie à l’inanité de certaines productions « du cru », si j’ose dire, et à ses excès. C’est, en somme, sa « note d’intention » ; son explication.

Aujourd’hui Sixx s’exprime musicalement plus et mieux que jamais entre Mötley Crüe (qui toute nostalgie subjective mise à part, a réussi le tour de force de sortir son meilleur album après vingt-sept ans d’existence) et Sixx A.M. Il est aussi en train de se construire une image de photographe que j’estime, avec une prédilection qui ne surprendra personne – le portrait. Et notamment le portrait de freaks, comme lui. Ils sont disséminés de façon anarchique sur ses différents sites internet comme autant de tronches de laissés-pour-compte de l’Amérique - de la vieille obèse engoncée dans un fauteuil roulant entre deux caravanes crasseuses au pépé rigolard, buriné et alcoolique. Parmi ces shoots de créatures (dans lesquelles on retrouvera parfois et sans surprise ses « copains » de Mötley), se glissent quelques natures mortes, parfois gracieuses, parfois dérangeantes, souvent les deux… De quoi pardonner largement d’autres expérimentations plus convenues, ou le côté très cliché de certains portraits. La première fois, finalement, que Sixx ne parle pas de lui. Vraiment ?

I try to cover many different topics, people and bands in these (now) old pages. But I have to admit some are overrepresented : Metallica, the living debauchery known as GNR and, of course, ol’fart Nikki Sixx. So here we go fuckers. This guy has been fascinating me since, wow, don’t even remember. In fact, I was fond of Sixx way before loving the Crüe. A total artist, is what he is. Sure, when you’re wielding too much blades you can’t master them with the same efficiency, but our big boy is doin' good in music, writing (as long as you’re not searching for the next Kerouac), and also photography. Shooting freaks of nature, that’s what he does – not for a living of course, the man is shitting dollars since thirty years -, but, I firmly believe that, for the sheer love of doin' it. And please see for yourself, some of his visual work are truly amazing… Sixx, beyond all the business circus-related events he’s known for, has always been an interesting character inhabited by the same darkness that resides in you and me : a bleakness of the soul - which really shows in his pics.

Le site et le Myspace de Nikki Sixx.

...et toujours :

mercredi 20 mai 2009

Un passé qui ne passe pas

Signe des temps pas fameux ? Avatar du phénomène gloubiboulga appliqué au metal, pourtant déjà assez régressif pour ne pas en rajouter une louche ? Ou triste constat symptomatique d'une vérité : la scène serait si chiante en ce moment, qu'entre deux productions formatées chez Andy Schnaps et trois pochettes photoshoppées montrant un putain de marmot sous un ciel apocalyptique (This Godless Endeavour aura fait quelques émules), rien ne serait meilleur que de se réfugier dans ce que l'on sait être toujours aussi bon - et je ne parle pas de votre copine ? Toujours est-il que la dernière mode est à l'exécution intégrale de Ton Album Culte sur scène. Après Slayer et Reign In Blood, Metallica et Master Of Puppets, Mötley Crüe et Dr. Feelgood, et quelques autres que j'oublie, c'est Aerosmith, Judas Priest et Forbidden qui « menacent » de jouer intégralement et respectivement Toys in the Attic, British Steel et le grand Twisted Into Form pendant leurs prochaines tournées. Quant à Testament, c'est par le biais d'un sondage que leurs légions d'héritiers (réfléchissez, ce n'est pas dur) sont appelés à entériner une setlist exhumée de The Legacy et The New Order.

Pas bien convaincu par ce genre d'initiatives, un peu du même tonneau que cette pénible mode qui voit de vieilles gloires ré-enregistrer leurs vieux tubes (chez Andy Schnaps)... En sus d'être un concept assez réducteur et limité, ça laisse perplexe sur l'état actuel - notamment économique - du metal et de ses amateurs bien sûr. Le message n'est pas des meilleurs non plus pour les artistes qui peuvent apparaître comme figés dans une époque et dépendant d'un public purement générationnel... alors que le metal est sensé être l'exact contraire du conservatisme. Personnellement j'échange largement un Angel of Death contre un Flesh Storm. Quoi qu'il en soit, Ton Album Culte joué en entier est certes un bon filon, mais finalement, si peu flatteur. Bien sûr, je me dédierai sans sourciller quand Guns tournera à cinq pour jouer tout Appetite For Destruction, mais ça me paraît peu probable, je soupçonne Steven d'être mort depuis quelques temps - simplement mû par quelque nécromancie le temps de ces occasionnelles téléréalités dans lesquelles il s'exhibe.

It’s a shame, but it seems the latest trend is seeing all our "vieilles gloires" of yore touring in its entirety their cult album. Talkin' 'bout the cash machine... Take Slayer, for example. Ok, I like Reign In Blood as much as you but I won’t mind them playing fuckin’ World Painted Blood from alpha to omega, ‘cause World Painted Blood is the decade’s utmost destructive thrasher coming from this side of the Atlantic (which is the left side for me, remember ? I eat bread every day). Alas, metal these days is plagued with conservatism – thinking of it, another common point with ol’ good Sheol.

samedi 2 août 2008

Coke En Stock

Le problème numéro un de Nikki Sixx ? La reconnaissance. Le songwriter de Mötley Crüe, quelque peu méprisé par les gardiens du temple de la musique populaire, ne sera jamais reconnu - pas par les gens qui « comptent ». L'univers du glam, comme on l'appelle aujourd'hui (on rappelle que les publications d'époque parlaient de heavy metal), c'était un peu la cour des miracles. Sortir de ce carcan ghettoïsé, et plus tard, tourné en ridicule, était une autre histoire. Jugez plutôt : la seule fois que les Cröütes inspirèrent les respectables et chiatiques Dire Straits, ce sera pour écrire Money For Nothing. Et si les Stones voyaient Axl et sa bande comme leurs fils plus ou moins naturels, ils n'eurent pas ce doute de paternité pour le Crüe. Notre ami n'atteindra jamais le statut dont il rêvait : une reconnaissance à la Springsteen et une aura à la Lou Reed, qu'il vénère. Question de respectabilité - il est plus chic d'être, comme Guns N' Roses, le rejeton des Stones et de Led Zeppelin, plutôt qu'un bâtard enragé, fils morveux des Dollz et de Kiss. C'est ainsi, et Sixx, au gouvernail du Crüe depuis le début, en a pris son parti. Ça l'a longtemps tué à petit feu, mais le bonhomme a compris qu'il n'avait pas que de la musique à vendre : en bon ricain, il sait que son produit-phare, son fond de commerce number one, c'est lui-même. D'où ces Heroin Diaries, carnets intimes hilarants, révoltants, désespérés. Et respectueux, il va sans dire, de la sainte-trinité du rock : la musique (un peu), le cul (beaucoup) et la came (plus qu'une armée de curés défroqués ne pourraient en bénir).

Exhumé d'une époque tourmentée, centré sur 1987 (Girls, Girls, Girls), ce journal réassemblé est composé d'un patchwork de notes griffonnées par Nikki Sixx. Totalement dérangé, rendu psychotique au sens premier du terme par ses multiples addictions, le bassiste livre des centaines d'anecdotes, de réflexions et de ressentis couchés sur papier, que ce soit chez lui, dans la fameuse « drug house » de Van Nuys, ou en tournée dans la chambre d'un palace. Le lecteur est constamment ballotté d'un extrême à l'autre : au rayon comédie, la limousine noire dépêchée par les loustics pour leur livrer de la poudre alors qu'ils pêchent (à tous les sens du terme) sur un lac de montagne, déboulant sous les yeux médusés de touristes (Sixx et Lee, tellement défoncés, passent la nuit sous leur tente à croire qu'ils sont sur un tapis-volant)... Dans le style tragique et romanesque (donc rock star), on retrouve, quelques pages plus loin, un Sixx solitaire et héroïnomane au dernier degré qui, tout millionnaire qu'il soit, s'administre un shoot sordide dans les chiottes à la turque d'un bar crasseux. L'eau qu'il utilise pour procéder à l'ébullition dans la cuillère ? Je vous laisse deviner. J'ai pourtant ingurgité quelques bios pas piquées des vers, mais on hallucine littéralement à chaque page écrite par ce survivant qui, il le sait aussi, est né sous une putain de bonne étoile pour être encore là, pas si mal en point - malgré de multiples overdoses et une quasi-mort clinique (expérience narrée dans Kickstart My Heart).

Valeurs ajoutées essentielles à ces Heroin Diaries, de multiples personnages interviennent, authentifient et commentent, avec vingt années de recul, les événements consignés en ces pages. Et le moins que l'on puisse dire... c'est que Sixx en prend pour son grade ! Faut dire que Nikki semblait être, comme il se voit qualifié à maintes reprises, un sacré trou du cul - il faut voir notamment la façon dont le sick muthafucka considérait les filles. À peine son affaire faite, pour peu que son état le permettait, que la demoiselle se voyait dégagée de la chambre d'hôtel afin que monsieur puisse passer la nuit à se camer sans avoir à partager ! Comme il le dit lui-même, « les filles, c'était le truc de Vince - une groupie venait à peine de le quitter que deux autres entraient dans sa piaule. Moi, j'aimais bien les filles, mais j'étais amoureux de la drogue ». En parlant d'hôtels, on mentionnera l'incroyable aventure japonaise (les dates nipponnes du Girls Tour) - lire la péripétie du stand de tir improvisé dans les couloirs du Hilton tokyoïte... Tommy et Sixx, déchirés, se trompent de flingue : au lieu d'une arme à air comprimé, c'est avec un pistolet de détresse chargé de fusées éclairantes qu'ils font feu ! Et gare aux japonais mécontents : il semblerait que la phrase préférée des Toxic Twins, durant le séjour, fut un élégant « on vous encule, vous avez perdu la guerre ! »... Connards, vous avez dit connards ?

The Heroin Diaries s'ouvre sur un préambule dans lequel Lemmy et Alice Cooper témoignent de l'extraordinaire dangerosité du mode de vie de Sixx à l'époque (« tu nous bats tous, mec », lâche le père Kilmister). Pourquoi ? Comment en arrive-t-on à de tels états si proches de l'Ohio ? A titre d'exemple, Sixx appelle plusieurs fois par jour sa sécurité pour signaler, depuis la penderie (sic) dans laquelle il passe son temps, des mexicains armés sur le point de l'attaquer. Avant d'accueillir ses sauveurs avec un fusil chargé... Autre absurdité récurrente : sa manie de foutre sa came aux chiottes pendant ses crises de parano, parfois plusieurs fois par nuit (phrase récurrente du dealer : « are ya fuckin' nuts or what ? »)... On croise évidemment quelques célébrités, notamment Slash qui se pissait régulièrement dessus lors de beuveries. Commentaire d'époque de Sixx lorsque sa douce lui fait remarquer cette immonde habitude : « ça m'arrive aussi ». Les fans de Skid Row apprécieront l'entrée mentionnant un gamin d'une quinzaine d'année qui, croisant le Crüe, annonce à Sixx qu'un jour lui aussi serait une star - le futur Baz, bien sûr. Enfin, Robbin Crosby de Ratt fait de fréquentes apparitions dans le livre. Le bougre ne sortira jamais de ses excès et finira par crever, obèse et séropositif, d'une overdose.

On s'esclaffe franchement à la lecture de Heroin Diaries, mais on comprend aussi que cette année 1987 est une année de sévère dépression pour un jeune type laminé par un succès même plus pensable aujourd'hui - et aussi par quelques bagages assez lourds remontant à sa plus (ou moins) tendre enfance. Une observation toutefois : rock star en souffrance, oui, mais à plaindre, voilà un pas que je me garderais bien de sauter : un tel destin n'est pas une malédiction et merci de ne pas faire passer des vessies pour des lanternes... Comme le dit l'ex-manager du Crüe, « on ne demandait à ces gamins que deux heures de travail par soir, ce n'est pas moi qui leur plantait des seringues dans les bras »... Il demeure évident que la polyaddiction de Sixx (alcool, crack, cocaïne, héroïne, prozac, somnifères, hash, méthadone, Halcion) trouve ses racines dans de vraies fêlures, exposées avec une impudeur voyeuriste. Et la reconnaissance dont nous parlions au début, dans tout ça ? Pas de réponse concernant cette quête violente qui traverse ce journal intime comme une décharge un électrocuté... Une intuition, plutôt : je ne suis pas sûr que ce soit après ceci que court Sixx aujourd'hui. Toujours rebelle dans l'âme (je maintiens que pas une scène ne fut plus extrême que celle du hard rock américain des années 80), mais plus vieux, plus sage, le sick motherfucker se fait désormais philosophe à ses heures, partageant plus d'un trait avec Lemmy : après eux, le déluge...

Un mot rapide sur l'objet : il est esthétiquement superbe, depuis sa charte graphique mariant invariablement trois couleurs (le noir pour l'anarchie, le blanc pour la poudre et le rouge pour le sang, menstruel ou dégouttant des seringues) jusqu'aux illustrations stylisées, paraboles symbolisant l'état de déchéance de Nikki Sixx. Enfin, et l'on finira avec ceci, le tout est parsemé de photos d'époque plutôt parlantes (polaroids de groupies à poil, de roadies en train de sniffer, etc). Si votre mère est dessus, ne vous inquiétez pas - les yeux sont le plus souvent barrés de noir. J'espère seulement que ce n'est pas celle qui pose avec, hum... la bouteille de champagne.

Nikki Sixx and Dave Mustaine share the same number one trouble : an unsatiable need for acknowledgement (and for a good measure, add a pinch of abandonment issues). Nikki never really reached this “classic songwriter” status he dreamt about – the Crüe is basically too raw, unpolished at heart and will forever remain as an underdog in US popular music. Unlike GNR if you see what I mean. Well I believe the man really came to terms with it – rather than music, he now concentrates on his number one private business : himself. Hence these Heroin Diaries, packed with funny as hell tour-stories revolving around, well… sex, drugs, and rock ‘n’ roll - but nonetheless a violent and dangerous quest about finding himself. What a journey to hell and back again...

The Heroin Diaries : A Year in the Life of a Shattered Rock Star (Nikki Sixx, avec Ian Gittins, chez Pocket Books)

Le site et le Myspace de Nikki Sixx.


...et toujours :

Cacharel - for sixx muthafukaz only
Shout at the « needle » !

lundi 28 juillet 2008

Satan l'habille

Plusieurs choses. D'abord, que Gaahl, l'homme qui ne cligne jamais des yeux même lorsqu'il éternue, soit sorti du placard n'est pas un évènement en soi. L'homme a oublié d'être stupide et semait assez de petits cailloux, ces derniers temps, pour ne prendre au dépourvu que les aveugles. Enfin, quiconque a entr'aperçu ses peintures (notamment dans le documentaire de Pete Best) ne pouvait plus ignorer la baleine sous le gravier. Qu'il soit gay, grand bien lui fasse - le terrain a été défriché par Monsieur Halford avec pudeur et classe (comme toujours) depuis un moment déjà. Et que le norvégien fasse partie de la scène black metal, on s'en contrefiche plus encore - je ne vois pas d'incompatibilité majeure entre ceci et cela... Il ne reste guère plus que la scène glam / hair metal US pour rester fondamentalement hyper-hétéro, hyper machiste et souvent homophobe - un paradoxe qui n'en est pas un pour ceux qui la connaisse (comme le répétait à l'envi les bagarreurs de Mötley Crüe, « on porte peut-être plus de maquillage que toi, mais ça ne va pas nous empêcher de te botter le cul »).

En revanche, le sel de l'affaire qui nous concerne, c'est cette ligne de fringues que s'apprête à lancer Gaahl, allié pour l'occasion à la styliste Sonja Wu. Destinée aux femmes, cette collection se propose, dixit Gaahl, de « révéler leur élégance et leur féminité » à ces dames. Enfin, le nom choisi pour cette ligne, Wynjo, signifie « bonheur » en vieux norrois. Quant à Infernus, ancien et désormais honni acolyte de Gaahl, il n'est pas oublié : des costards lui sont régulièrement taillés sur mesure... Lancement prévu pour septembre, à Bergen !

Ok, Gaahl’s a happy gay man. So what – who gives a shit about it except lowlifes endlessly theorising what black metal should or shouldn’t be, should or shouldn't fuck ? Then again, is it really a surprise – I don’t think so. Same went years ago with God (well, I mean Rob Halford). No, really, what struck my attention wasn’t Gaahl’s sexual life, but his unexpected, coming-soon clothing line, Wynjo. Art, unlike private life, politics or whatever the fuck you want, knows no compromise. And if a true artist you are, so it is, flowing everywhere around you, using every channel it can find, be it haute couture or black fucking metal.

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Under the Sign of Moltonel

mercredi 26 septembre 2007

Sans foi(e) ni loi

WASP, pour votre serviteur, a toujours été au metal californien ce que Joe Dante est à Spielberg. Sa face obscure, son côté moins avouable, sa... mauvaise conscience, en quelque sorte. WASP, c'est un peu un Bon Jovi ou un Kix à qui l'on aurait donné à bouffer après minuit : une saloperie de gremlin (pour ne pas dire un critter - je vous renvoie au clip de Scream Until You Like It) prêt à prendre en levrette tous les gizmos de la terre (par le petit trou).

Mais WASP, toujours pour votre serviteur, c'est aussi et surtout un personnage : Blackie Lawless. Maître-chanteur en chef, ce pétroleur intérimaire chez les NY Dolls acheva de ciseler son style dans Sister et London au côté de Nikki Sixx, avant de former le groupe le plus outrageux et décadent - le Crüe - de son époque. Indien d'origine (encore un, y'a sûrement quelque chose à gratter si l'on voulait faire de la socio de comptoir), géant bagarreur dans son adolescence au point de refaire le portrait d'un instructeur militaire à quinze piges, notre homme est plus complexe qu'il n'y paraît et a su donner toujours plus de corps, de densité, de sens à son groupe au fil de sorties pas toujours géniales, mais au minimum dignes d'intérêt. Mais surtout, surtout, convaincu d'être un entertainer avant tout, Lawless reste emblématique de ce statut très anglo-saxon que le faible rayonnement du metal hexagonal n'aura jamais permis de faire éclore ici... à de rares exceptions près (on sait qu'un Hreidmarr, par exemple, connaît son petit WASP illustré sur le bout des doigts).

Au-delà de la musique, dont on pourrait causer un moment tant WASP était différent (qui d'autre a su se nourrir ainsi de ce feeling NWOBHM, loin des légèretés chiées par Ratt, Poison et autres Cinderella ? Qui d'autre arrivait à injecter dans son art ce côté classic rock emprunté tant aux Kinks, qu'aux Beatles ou qu'aux Who ? Qui d'autre aura su si bien passer en quatre albums des couilles [WASP, 1984] à la cervelle [The Headless Children, 1989] ?...), ce que j'aime par-dessus tout c'est la voix de Lawless. Hurlée ou chantée, éraillée et puant le bourbon autant que gorgée d'émotion, elle possède ce grain unique de mélancolie tragique qui, s'il était là dès le début (Hellion, Sleep In The Fire), sera finalement dompté à partir du génial et cathartique The Crimson Idol, un album indispensable à toute discothèque, metal ou pas, digne de ce nom.

Stakhanoviste, perfectionniste, Lawless a arrêté voilà bien longtemps de se fournir chez Doctor Rockter (connu par d'autres sous les noms de Doctor Feelgood ou Mr. Brownstone) et continue de sortir album sur album. Le dernier n'a qu'un tort, être sorti trop tard pour devenir un classique, mais j'avoue me contenter largement des cinq (six en comptant le Live... In the Raw) premiers. Autrefois assis sur le trône crasseux de la scène glam de L.A., Blackie est aujourd'hui un froid contempteur de son pays, plus du tout poseur mais peut-être un peu donneur de leçon, et dont le discours se situe quelque part entre ceux d'un Jourgensen et d'un Mustaine. Une chose reste certaine : même s'il ne découpe plus des nonnes dénudées et crucifiées (Arkhon, tiens-toi bien), même s'il ne balance plus des quartiers de bidoche à son public (Mayhem, tiens-toi bien), et même s'il ne transforme plus son sexe en scie à métaux (une électrocution l'en a dissuadé il y a bien longtemps !), ce cher Steven Duren reste un véritable Rebel in the F.D.G.... et plus qu'un de nos pairs, un de nos pères.

En bonus, l'ahurissante interview du mean man Chris Holmes, devant la camera de Penelope Spheeris (et devant sa mère atterrée) pour le film culte The Decline of Western Civilization Pt. II

WASP was to Cali glam metal what Joe Dante is to Spielberg – a fuckin’ critter always ready to tear everything apart. Dictator-in-chief Blackie Lawless is a bigger than life character – the boy cut his teeth with a short run in NY Dolls and a stint in London, a great, time-forgotten L.A. act serving as a springboard for future hellions such as Nikki Sixx, Lizzie Grey or, fuck me, mighty Izzy Stradlin. You don’t know London ? Well, get that hard rock maverick that is Non Stop Rock. But let’s get back to Blackie ! As a true American entertainer, our part-Native American giant took WASP to the stars and beyond, armed and dangerous with a handful of killer songs (and as much quarters of meat and shocking pictures). It should be noticed that WASP was a total, full-on heavy metal band whereas its contemporaries were often leaning on the more commercial side of it all. Hear Blackie’s gritty, fateful voice screaming his guts out and join him in the Fuckin’ Decadent Generation !

Le site et le Myspace de WASP.

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With your bitch slap rappin' and your cocaine tongue / You get nuthin' done

jeudi 1 mars 2007

Nature morte

Loin des huiles sur toile tapageuses sinon criardes qui ont orné tant de grands albums, du heavy metal vintage des eighties (Riggs, Wilkinson, etc) à sa frange obscure plus récente asphyxiée par les répétitifs travaux des Necrolord, Verwimp, Seagrave et cie ; loin des comiques pochettes photographiées et bigger than life du hard rock américain et ses excès (derrière un cliché de Mötley Crüe ou de Cinderella se cachent quinze sprays de laque, dix pots de gel, et pour les rails de coke, multiplier le nombre de prostituées présentes par le nombre de chicots restant encore accrochés dans la bouche de Mick Mars) ; plus loin encore de ces ignobles jaquettes photoshoppées/stéréotypées qui pullulent actuellement - en particulier l'infographie 3D, véritable catastrophe que l'on devrait réserver exclusivement aux albums présentant aussi peu d'âme que la technique en question (passez-moi les Mnemic)...

...Loin, très loin de tout cela donc, se situe cette pochette intemporelle au charme suranné, reproduisant une bien étrange photographie. Reflétant à merveille le contenu musical de l'œuvre qu'elle habille, cette scène atmosphérique, de laquelle sourd un sentiment diffus d'inquiétude et de malaise, reste avare de ses secrets. Où donc ce cliché a-t-il été pris ? Qui est cette femme, silhouette iconique statufiée pour l'éternité devant cette église dont le glas ouvre l'album ? Autant de questions qui ne méritent aucune réponse : le charme vénéneux de cette photo se suffit à lui-même. Aujourd'hui encore, il demeure mille fois plus impressionnant que les artifices d'une jaquette comme celle de l'excellent Dusk And Her Embrace (Cradle Of Filth), vraisemblablement très inspirée par le visuel de ce premier Black Sabbath. Une réussite totale, vieille de trente-sept ans (!) et dont la puissance évocatrice tient à son extraordinaire pouvoir de suggestion. Ce sont alors les « forces de l'esprit », chères à certains, qui prennent le relai.

« The cataract of darkness forms fully, the long black night begins, yet still, by the lake a young girl waits, unseeing she believes herself unseen, she smiles, faintly at the distant tolling bell, and the still falling rain... »

nota bene : Marcus Keef, auteur du cliché, a longtemps entretenu cette légende qui voudrait qu'aucun personnage n'ait été photographié ce jour-là, cette femme spectrale ne s'étant révélée qu'au stade du développement... Fear !

"The cataract of darkness forms fully, the long black night begins, yet still, by the lake a young girl waits, unseeing she believes herself unseen, she smiles, faintly at the distant tolling bell, and the still falling rain...". I don’t feel like adding anything to this eerie, evocative sentence, except that its profound darkness is more vivid than ever in this Marcus Keef’s Black Sab’ cover. Man, right now I only know two things : this is better than any of today’s over-photoshopped generic metal artwork, and, I never, ever want to see this solitary silhouette in my life ! Ya see, I’m a big boy now (well, sort of…), but it still gives me the fuckin’ creeps.


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Artistiquement vôtre !

vendredi 19 janvier 2007

Paint it Black !

Au sujet d'Etude ; Torse, Effet de Soleil (1876), le critique d'art Albert Wolff, révulsé, écrivait à l'époque : « essayez donc d'expliquer à ce Renoir que le torse d'une femme n'est pas un amas de chairs en décomposition avec des tâches vertes, violacées, qui dénotent l'état de complète putréfaction chez un cadavre ». Quant à Alfred de Nieuwerkerke, voici le regard qu'il portait sur les impressionnistes : « ils font une peinture de démocrates. Ces hommes qui ne changent jamais de linge voudraient s'imposer aux gens du monde ? Cet art me déplaît et me dégoûte ». Certes, on pourrait appeler les impressionnistes « peintres de la lumière » et, par opposition, qualifier les musiciens de black metal de « musiciens de la nuit ». Reste que le parallèle est amusant et qu'encore une fois, un petit groupe de francs-tireurs au sein d'un domaine artistique peut décider de faire tabula rasa des conventions, des académismes et de la bienséance au nom de la liberté artistique - et donc d'expression.

Si les impressionnistes, avant-garde bariolée, soldatesque picturale soudée peut-être plus encore par le goût de la piquette montmartroise que par le pinceau, mirent des années avant de pénétrer ce bastion du classicisme qu'était le Salon de Paris, que dire alors de ces gamins qui, à l'orée des années quatre-vingt-dix, régénérèrent en le poussant dans ses paroxysmes un art si abrupt qu'il fut d'autant plus facile de l'escamoter dans la colonne des faits divers ? Cependant qu'Utrillo multipliait les séjours en maison d'arrêts, ses toiles, par lesquelles il payait en nature ses monumentales cuites, prenaient de la valeur dans les troquets sordides de la capitale. Lorsque le dernier membre incarcéré du line-up de In The Nightside Eclipse recouvra sa liberté, Emperor était devenu une légende de son vivant, n'attendant que la mort pour être mythifié !

Ce qu'écrivait Albert Wolff à propos de Renoir me rappelle finalement les vieilles chroniques d'albums devenus référentiels depuis. Tandis qu'Hard Force et consort (ou qu'on sort pas, d'ailleurs) parlaient de « dégénérés du bulbe » (sic) au sujet d'Emperor ou nous expliquaient que les deux frères d'Immortal (re-sic) étaient musicalement « à la rue », ces derniers façonnaient le nouveau visage du metal extrême au point qu'on en retrouve aujourd'hui les échos dans n'importe quel sous-groupe de metalcore US (un paradoxe en soi !). Renoir, de peintre bohème, devint un notable respecté auquel on s'adressait en n'omettant jamais de commencer par « Maître ». Si Ihsahn, fait citoyen d'honneur de sa ville natale de Notodden, ne demande pas tant d'honneur aux jeunes musiciens à qui il ouvre son studio et donne des cours de musique, ce sont en revanche ceux qui le brûlaient hier qui lui donnent aujourd'hui du « Maître ». Moralité : les gens évoluent, et les dégoûts d'une époque deviennent parfois les goûts de la suivante (sauf dans le cas d'Evol bien sûr...) !

nota bene : cette notule m'a été inspirée par la lecture de l'excellente biographie de Suzanne Valadon par Michel Peyramaure, qui m'a parfois rappelé, oserais-je le dire... The Dirt, la bio de Mötley Croüte ! Les Escaliers de Montmartre ; Le Temps des Ivresses sont à lire chez Pocket.

There’s not only metal in life – there’s also Impressionism, a pictural movement which I am fond of. And I’ve always made a parallel between it and black metal. Impressionism, a loose association of painters some of whom were unbelievable hard-partyin’, hard-druggin’, hard-livin’ motherfuckers, were also radicals, franc-tireurs whose art was breaking every existing rule (and in  some cases, the law). A real motley of a crew ! Garnering at first only hostility and miscomprehension, Impressionism finally became a respected, valid form of artistic expression – see what I mean ? I suggest you read a bio of painter Suzanne Valadon. Fuck, there’s as much sex, alcohol and, well, art in there as in The Dirt. Duh !

mercredi 19 octobre 2005

Shout at the "needle" !

Frank Ferrana change son nom pour Nikki Sixx en 1980 et connaît une carrière et un succès extraordinaires avec Mötley Crüe le temps de cinq albums, de Too Fast For Love à Dr. Feelgood. Extrémiste frappadingue, fêtard invétéré, icône autodestructrice ayant ingurgité plus d'alcool et de drogues que Lemmy Kilmister et Keith Richards réunis, Sixx est la rock star absolue, anti Kurt Cobain doublé d'un trompe-la-mort qui doit bien en être aujourd'hui à sa neuvième et dernière vie... Totalement impudique, honteuse, révoltante mais encore plus drôle qu'une élection de chef de parti chez les Verts, The Dirt, l'autobiographie du Crüe, est un must-have pour qui veut savoir ce qu'est le rock n' roll way of life poussé à son paroxysme (et au delà). Nikki Sixx en est le personnage central et sélectionner des morceaux choisis s'avère difficile : chaque page contient au moins une anecdote hilarante / obscène / incroyable / dégoûtante (plusieurs réponses correctes possibles). Pot-pourri... :

«
As I shot more and more cocaine, paranoia set in and soon I hardly let anyone in the house. I would sit naked day and night. My veins were collapsing and I would scour my body to find fresh ones : on my legs, my feet, my hands, my neck, my dick. I started seeing people in trees, hearing cops on the roof, imagining helicopters outside with S.W.A.T. teams coming to get me. I had a .357 Magnum, and I'd constantly hunt for people in the closets, under the bed, and inside the washing machine. I called my home security company so often that they warned patrol men to answer my alarms with caution because I had pulled a loaded gun on so many of their employees... 
»

« We thought we had elevated animal behavior to an art form. But then we met Ozzy (...). He was a trembling, twisting mass of nerves and crazy, incomprehensible energy, who told us that when he was in Black Sabbath he took acid for an entire year to see what would happen. There was nothing Ozzy hasn't done and, as a result, there was nothing Ozzy could remember having done. We hit it off with him from day one... »

« It was so funny that everyone thought I was dead after having overdosed, that as soon as I returned home, I walked to my answering machine and changed the message. « Hey, it's Nikki. I'm not home because I'm dead ». Then I went into the bathroom and pulled a lump of heroin out of the medicine cabinet (...). I woke up the next afternoon sprawled across the bathroom floor with the needle still dangling out of my arm. The tile floor was covered with blood. I passed out again. Somewhere, far away, a phone rang. "Hey, it's Nikki. I'm not home because I'm dead" »...

Frank Ferrana became Nikki Sixx in 1980, before experiencing fame and multinational stardom with the Crüe up until Dr. Feelgood. As a true autodestructive badass, anger-and-drug-driven partying motherfucker, Sixx is THE rockstar in all its indecent splendour. So stop reading that shit, help yourself with a tequila and The Dirt, a funny-as-fuck account of our hero’s misdeeds !

samedi 8 octobre 2005

With your bitch slap rappin' and your cocaine tongue / You get nuthin' done

Le rock n'est pas mort. Mais il a perdu beaucoup d'attitude. Attitude ? Oui... Au rock, ce que la sauce blanche est au kebab. Sans cet ingrédient, eh bien cela passe toujours, cela reste comestible... Mais putain il manque quelque chose d'essentiel, et c'est sacrément moins bon. Guns N' Roses (le vrai, à savoir Axl, Slash, Duff, Izzy, Steven et personne d'autre), Mötley Crüe, Skid Row, WASP, L.A. Guns... Dans mon dictionnaire perso des synonymes, voici les noms que l'on trouve au mot « attitude ». Je me contrefous que ces groupes soient aujourd'hui uncool aux yeux et oreilles de beaucoup. Inutile de tergiverser trois ans, la simple écoute de brûlots comme Out Ta Get Me, Kickstart My Heart, Youth Gone Wild - quel morceau extraordinaire - ou encore Nothin' Better To Do vaut plus que tous les plaidoyers du monde. Tous permanentés ? Peut-être. Mais surtout de sacrés zicos dévoués corps et âme au Rock N' Roll.

Mieux encore, crades, sales et exhalant stupre et sueur, des morceaux tels Nightrain ou Midnight Tornado restent aujourd'hui de purs bijoux, des perles noires de hard-rock urbain et crépusculaire. Les jeunes loups des combos précités appartiennent au passé, Slash a pris du ventre, Sebastian Bach fait des comédies musicales, d'autres sont morts ou se sont embourgeoisés... Mais la flamme n'est pas éteinte, the fire still burns comme dirait Dee Snider. A l'heure où le rock s'intellectualise parfois trop, j'aimerais retrouver des groupes de la trempe de tous ces fantômes qui continuent à arpenter le Sunset Strip Boulevard dans mon esprit et dans ma chaîne hi-fi. Et avec autant d'attitude. Fuckin' at-ti-tioude.

Ever try to eat a döner kebab without its greasy whiter yoghurt sauce ? Nothing to die for, uh… Well, same goes with rock ‘n roll without some fuckin’ attitude… It can still be good on occasions but, hey, there’s really somethin’ missing in here. Guns N’ Roses, the motherfuckin’ Crüe, Skid Row, ol’dirty bastard Blackie and his wasps, LA Guns... Here’s the real deal. Forever dirty and smellin’ like dead fuckin’ rats drowned in blood and sperm, motherfuckers like Nightrain or Midnight Tornado are still the shit today : black gems of urban, gritty hard rock never topped since then. Ok, Slash has a fuckin’ peacemaker and Baz is doing lame-ass TV shows, but hey, listen to Dee Snider : the fire still burns – and it still needs some balls-and-fucking-attitude !