mardi 29 décembre 2015

Lemmy Kilmister 1945 - 2015 : born to lose, live to win

J'aime éviter le pathos et espère ne pas sombrer dans cet écueil mais le décès de Lemmy - inutile de revenir sur le personnage et ses soixante-dix années atteintes on ne sait trop comment - m'a touché. La  disparition d'un personnage inconnu personnellement, seulement vu de loin en concert dans un Zénith, mais qui fait partie de ma vie depuis si longtemps. Forcément il emporte quelque chose de moi-même. Gamin, à 12 ans, 1916 fut avec Let There Be Rock et Hysteria le premier album que j'empruntais à la bibliothèque municipale pour le copier sur support cassette.

J'ai toujours cette vieille BASF sur laquelle figure l'album d'AC/DC en face A, celui de Motörhead en face B. Ce 1916 que je tiens pour l'un des chefs-d'œuvre des Anglais. Nul en sport, bon à l'école sans me fouler et toujours fourré dans un bouquin, j'ai passé comme beaucoup quelques vrais mauvais moments sur les bancs du collège. Le hard rock - comme on disait - est une musique de marginal, et le metal extrême, a fortiori le black metal, est celle des vilains petits canards : on y vient car on a été poussé vers la frange qu'on s'est trouvé - je me comprends. Mais suffit de la digression. Mon intérêt pour le « hard rock » se répandit vite dans la classe et me rendit « cool »... l'espace de quelques mois. 1916 fut ainsi prêté, écouté, repiqué plus qu'à son tour. Un petit camarade se procura une image de tête de mort, sur le blanc du front de laquelle nous écrivîmes en lettres attachées : « AC/DC : Let There Be Rock / Motörhead : 1916 ». Pas assez réceptif à l'album des Australiens, je regrettais vite mon erreur d’ordonnancement et passais mon temps à accélérer la face A pour arriver plus vite à 1916. Mon père mit à contribution la photocopieuse de son bureau et nous réinventions, sans le savoir, cette charte graphique si chère aux démos black / death metal de l'époque : la sempiternelle photocop' monochrome lo-fi de chez lo-fi (plus tard, mon côté rain man me poussera à abattre un travail de titan en recréant, « chartant », standardisant toutes mes vieilles jaquettes via WordArt). Nous n'avions pas encore de lecteur CD à la maison... Lorsque cet appareil révolutionnaire intégra enfin le foyer familial, je possédais déjà mon premier « compact-disc » : A Real Dead One d'Iron Maiden, acheté plus tôt en prévision de cette acquisition que je savais voulue par mon père (mais ce fut Rust In Piece, sorti de la même bibliothèque, qui étrenna l'appareil). Concernant 1916, j'appréciais tout l'album et notamment l'étrange piste Nightmare / The Dreamtime. Quelques nappes de synthé à la sourde mélancolie et une ambiance aussi éthérée que menaçante au milieu du chaos habituel. Dans un genre très différent et toutes proportions gardées, c'est bien certains de ces éléments qui me firent succomber plus tard au black metal symphonique...

Quelques mois après la découverte de 1916, un oncle lyonnais d'un âge assez avancé me fit un magnifique cadeau qui trône actuellement sur ma bibliothèque : le vinyl original de Bomber, ayant appartenu à son fils cadre quarantenaire. Dire que je n'imaginais pas que ce vieil appartement modeste abrite en son sein un tel artéfact est un euphémisme et ma surprise n'eût d'égale que ma joie (je récupérais aussi Born Again de Sabbath, sur lequel Gillan vocifère magistralement Neon Knights et Digital Bitch entre autres perles). Il faut relire White Line Fever (l'expression d'une sagesse rabelaisienne et désabusée qui émergea de cette vie de dingue), écouter aussi Head Cat qui complète tellement Motörhead. Lemmy est un personnage important dans ma mythologie personnelle : j'ai bu quelques whiskies à sa mémoire, en matant des vidéos sur YouTube, et en regrettant le temps qui passe.

So sad to have learned about Lemmy's "untimely" (?) passing. The man was a wise, adventure-ridden old rock n' roller and lived true to his famous motto "Born to lose, live to win". My first encounter with the gentleman and his motley crew was through 1916, a great release and personnal masterpiece. Eversince that day, Lemmy was a prominent figure in my personnal pantheon, and I do not have powerful enough words to pay him the tribute he deserves. You don't know me man, but I love you. May the earth rest lightly upon you. So sad. So sad.

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dimanche 27 décembre 2015

Un bon livre, qui soul un peu

The Book Of Souls... dès le titre, un sacré programme. Il faut pour ce premier double-album : tenir la distance quand on se nomme ainsi ; et il faut pour le fan plus forcément vache-à-lait : faire fi d'une grandiloquence titulaire qui garantit toujours le pire comme le meilleur chez les anglais. La mission est accomplie compte-tenu de ce qu'on attend aujourd'hui. C'est le principe de réalité, cette aptitude à ne pas attendre la satisfaction pulsionnelle mais à composer avec une réalité objective. On est en 2015, Iron Maiden ne joue plus au Ruskin Arms depuis longtemps, les gamins pensent que Bring Me The Horizon est un groupe de metal et les clochards de Soulfly ont sorti plus d'albums que Sepultura.

Il faut oublier cet habituel premier single rapide et peu inspiré (Speed Of Light est une horreur) : l'album s'ouvre sur If Eternity Should Fail, bijou de fer ouvragé à la respiration ample et puissante... La chanson exhale un souffle épique qui porte le reste du disque : ce début est aussi son sommet. Le reste est un terrain conquis, avec ces touches folk présentes depuis plus d'une quinzaine d'années qui font partie de l'ADN de Maiden au même titre que les twin guitars attack d'antan. L'excellence des dérapages rock n' roll de l'album est à signaler, entre Thin Lizzy et Gary Moore dont les ombres planent sérieusement sur When The River Runs Red... Dans une drôle de symétrie, on n'échappe pas, en revanche, aux longueurs qui caviardent l'écriture depuis Brave New World, surtout lorsque remplies de rien (The Red And The Black se traîne insensément, arrosé de chœurs faisandés que mon petit corps de fan ne digère plus. Sorel n'aurait jamais baisé la mère De Rênal s'il avait été si lourd). La seconde partie de l'album commence bien, en forme d'hommage au Maiden NWOBHM - celui de votre père éventuellement, celui que j'aime passionnément. Entendre l'ambiance Aces High ou Tailgunner dans Death Or Glory... Quant à Shadows Of  The Valley, c'est l'esprit de Somewhere In Time qu'il convoque brièvement... le temps de céder sa place au Maiden actuel trop avisé de sa recette pour en dévier bien plus longtemps.

C'est donc sans surprise, absolument aucune, que Maiden propose un plat « grand scope et mid-tempo » dans l'exacte continuité de ce qu'ils font depuis l’avènement de leur quatrième période (2000). Une ère miraculeuse, pas tant en termes de qualité - bien qu'A Matter Of Life And Death soit un grand album - mais bien de succès commercial insolent faisant mentir toute règle établie : Maiden aligne les premières places de tous les billboards, et réussit l'extraordinaire tour de force de se survivre sans se réinventer et de rameuter de nouvelles légions fanatisées comme je l'étais moi-même... Le principe d'immuabilité qui régit Steve Harris est le secret (pas bien gardé) de Maiden... Quand c'est pas cassé, faut pas réparer.

Well, well, well... Here's the new Maiden coming our way. The Book Of Souls is, as usual, a gargantuan release packed in a very nice special two-cd set (I urge you to get hold of the special edition). As always, there's the good (If Eternity Should Fail), the bad (The Red And The Black) and the ugly (Empire Of The Clouds - a bloated song emphasising everything I don't like anymore in Maiden). But hey ! Raise the hammers and fly high the iron banner nonetheless, 'cause Maiden will always be Maiden and still manages to be versatile despite its english immutability. There's high grounds and low ends to be found in this epic big fuckin' Book Of Souls, meaning fans will get the dose of (good) metal they need. Yep. Being a fan, how cool is that ? I ask you...

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Considérations théologiques

samedi 12 septembre 2015

Dans ton Zoon Zoon Zoon

Zoon est à Fields Of The Nephilim ce que ses vacances sont à M. Hulot. Une histoire a priori accessoire et pourtant essentielle, comme une récréation d'a(u/r)tiste où chaque détail n'en est plus un, à force de converger vers un Tout. Nefilim, hors-champs, coule dans ces microsillons labourés sous d'autres astres que les siens habituels un metal arcanique et ouvragé ; une boite à secret dont seul quelque cow-boy sorcier possède la clé. Un arbre de Sephiroth occulte mais évitant l'hermétisme une fois repérées ses bouches de métropolitain. On y rentre et on s'y perd, sur cet arbre de vie ; au gré de ses niveaux et de ses cercles dantesques. Ici sur des branches supérieures plus aériennes à la fragrance connue (Shine), là pris au piège de racines plongeant dans un humus séculaire et sinistre d'où vient, aussi, Fields Of The Nephilim (Venus Decomposing).

On échappe, avec une reconnaissance soulagée, à l'auteurisme prétentieux qui reste l'écueil redouté pour ce type de niches musicales (Christian Death échouera plusieurs fois à se saisir d'un Graal métallique trop opportuniste pour embarquer avec lui ses légions intransigeantes arborant Rozz au fusil). Si le metal n'est pas un bac à sable dans lequel on peut se vautrer l'espace d'un album facile en espérant le chef-d'oeuvre, Zoon sauve plus que l'honneur et reste une cabale passagère, mais fomentée avec talent par Carl McCoy. Doublé d'un secret bien mieux gardé que Julie Gayet.

Zoon is Carl McCoy's succesful attempt at creating a genuine metal album whilst remaining true to what Fields Of The Nephilim is all about. I won't bother to dwell much deeper into that discreet, unbeknownst-to-most record ; if you like to indulge in such sonic landscapes do yourself a favor and buy it, 'cause Zoon shoot straight and speak the truth.

lundi 16 février 2015

Mestre des Bestes, Roy des Leus Hullants

C'est un peu un exercice de style pour moi que cette notule, car ce jet d'encre numérique se fait en direct de mon smartphone (certifié fabriqué par des travailleurs pas nés lors de la sortie du premier Watain), ma commune étant frappée d'un embargo franco-français type « agent Orange » sur Internet depuis trois putains de semaines. Avanti !

Il me serait difficile ici de pérorer trois ans sur le génie d'Emperor, sur pourquoi In The Nightside Eclipse et Anthems To The Welkin At Dusk sont toujours l'indétrônable expression d'un black metal sophistiqué (voir verso des anthèmes crépusculaires), car c'est après tout (hey) stupide et vain de vouloir assommer quelqu'un avec une œuvre qu'il ne connaîtrait pas / mal ; aurait découvert à un autre moment / autrement que soi-même. En d'autres termes ces albums - purs manifestes d'art total, ce que d'aucuns appelleraient aussi un « gros fuck » - me sont chers pour de multiples raisons n'ayant pas trait qu'au génie de composition, ni qu'à l'avant-gardisme de leur bestialité intellectualisée, ni qu'à l'intransigeance autistico-artistique d'Ihsahn qui aura su, par icelle, se préserver des éclaboussures des événements. Non, ces disques (plaisir que d'utiliser ce mot) me sont précieux parce qu'ils sont tombés dans ma vie au bon moment, trouvant en moi un réceptacle à cette musique classique d'un nouveau millénaire ou plutôt d'un inframonde insoupçonné. Towards The Pantheon, With Strenght I Burn, Thus Spake The Nightspirit, Inno A Satana, Ye Entrancemperium, Ensorcelled By Khaos... seront émulés pour toujours car la bannière sinistre et puissante que ces pièces convoquent rallie, générations après générations, de nouveaux sujets avides de bruit et de fureur, de sturm et de drang (aspect qui ne pouvait qu'être saisi, et rejaillir puissamment, dans la scène française via Forbidden Site et consorts).

Dyonisos est largué, Apollon azimuté, c'est le mestre des bestes qui mène la charge, sans compassion, sans mercy. Coulé dans son élégant chaos, le black metal sophistiqué qu'Emperor extirpait d'une poigne grêle et adolescente des tréfonds de sa Norvège rurale échappe aux principes admis de l'esthétique ; il demeure une étonnante assertion sonore où le lyrisme le dispute au féroce.


In The Nightside Eclipse and its follow-up Anthems To The Welkin At Dusk (not counting the Reverence EP, which is also a great release adorned with a grandiose version of Emperor's then-biggest "hit") are so dear to my heart. This body of work is not only a relentless manifesto of sophisticated black metal art, it is, to put it simply, the grimmest primal scream ever uttured from Norway's modern youthness as well as a valid art form derided and despised by many, adored by few. Long gone are the turmoils of the past, burning churches and thoughtless murders, as if black metal's decaying corpse begins, at long last, to let its iridescent soul to be seen.


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samedi 27 décembre 2014

Metallica au feu (de bois)

Photographie par Gary Wolstenholme

Jamais été fan de cette cohorte disparate, haute en couleurs et gigue-dansante regroupée sous les étiquettes sous-dimensionnées de « folk metal » ou « pagan metal » : trop de groupes, trop de foutoir, trop d'instruments, trop de meufs (nan je déconne. Vraiment.) et souvent trop de facilités. Le véritable esprit folk n'est-il pas à chercher du côté des naturalistes Agalloch ou Winterfylleth plutôt qu'auprès des enfileurs de perles habituellement évoqués sous cette bannière ? Moonsorrow cependant a toujours représenté à mes yeux un sceau de qualité, jouissant d'un statut à part conféré par leur ADN éminemment black metal ; du tremolo seconde vague plein les guitares et pas dans la voix notamment ; et exhibant une attitude tranchant volontairement avec le côté « fête au village » souvent dévorant dans le style.

La maîtrise de ces hommes-bêtes au patronyme baudelairien s'entend notamment dans la réécriture aux accents de reconquista bathorienne infligée à For Whom The Bell Tolls, morceau de bravoure de quasi huit minutes qui laisse, peut-être comme jamais depuis longtemps, s'exprimer la bête sauvage désormais matée tapie au cœur de Metallica. La dilution de l'introduction dans un océan atmosphérique d’ambiances et de guitare sèche, parsemée de hurlements déchirés et de chœurs discrets évoque immanquablement Quorthon (qui s'est servi plus qu'à son tour de certains éléments de Ride The Lightning), et lorsque que le chant fait irruption, des lignes comme Make his fight on the hill in the early day / constant chill deep inside ou Take a look to the sky just before you die / it's the last time you will trouvent une nouvelle signification, signe d'une réappropriation intelligente plutôt que d'une sage imitation. For Whom The Bell Tolls se trouve sur l'EP Tulimyrsky, recelant une autre superbe reprise qu'il faut entendre aussi.

Moonsorrow's very personal take on For Whom The Bell Tolls is indeed an interesting one, highlighting the long-lost fury of Metallica by transcending what was a martial-paced classic into a storming-yet-atmospheric pagan metal song. What really remains of the original song is its melancholic tone, perfectly fitting Moonsorrow as it once perfectly fitted the material displayed on Ride The Lightning.

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Voir Metallica et mourir

jeudi 20 novembre 2014

(still) Channeling the quintessence of quelque chose

Photo courtesy of Sheol

Channeling the quintessence of quelque chose, mais on ne sait plus exactement quoi... Ça fait si longtemps qu'on écoute du death metal, du black metal, et que l'on sait qu'Il n'existe que dans notre phantasmagorie - la vraie vie étant autrement plus hardcore que dans les paroles de Marduk ou Darkthrone. Merci Brel, merci Ferré, autres sidérurgistes  du réel ignorant le palm muting et le tremolo picking. Ça fait longtemps aussi qu'on fait la part des choses entre rébellion adolescente et soumission systémique, une place doit exister entre, on cherche notre air, on ne se rêve plus mais on espère toujours, on n'a que peu de temps, la vie est courte et la mort nous en guérira bien assez tôt. On a besoin d'acier pour mettre dans le roseau de notre squelette, d'argile pour combler les trous de notre estomac. Notre cerveau spongieux prendrait bien un peu de phosphore, mais du collagène ferait aussi bien illusion. Mais. Mais. Mais... Morbid Angel, à qui l'on pardonnera son satanisme original nourri aux sources américaines libéralo-LaVeyenne, demeure dans notre vie et sa puissance évocatrice aussi. Je ne renierai en aucun cas ce que j'écrivais ici, ou ce que je lisais ailleurs ; la musique de ces américains reste cette symphonie tellurique se nourrissant des racines de la Terre pour taquiner les Grands Anciens terrés dans ce coin, là, de notre esprit.

Dans une petite ville de Province Française j'ai vu le petit cirque de David et Trey, et toute la porcelaine de mon âme a été réduite à néant en l'espace de deux petites heures. J'ai de nouveau dix-sept ans, la vie devant moi, le temps est courbé par un trou de ver nommé Death Metal Supreme. Iron Maiden me déniaise, Metallica me terrasse mais Morbid Angel est un choc extrême ; Emperor viendra ensuite mais la bande à David et Trey et Pete et Mike et Richard et Steve et Eric reste un sigillé d'éternité et de puissance, un élixir de jouvence granitique, de montagnes hallucinées et de torrents indomptables. Encore et toujours, hier comme demain, loin du siècle dernier emprisonnant ces dix-sept ans dans une capsule lycéenne aux couleurs passées, j'écoute Morbid Angel les matins gris et les jours sombres. Un baume au cœur pour se rappeler que les secured limitations sont une vue de l'esprit et que, tout sac de chair et d'os que je sois, ma volonté existe. La nuit ? Que non, c'est bien la lumière qui point à l'horizon de cet art ancré au cœur de la montagne Death Metal, mais qui pourtant la surplombe. Morbid Angel, plus que bien d'autres Grands Anciens pour certains titans endormis (Nocturnus...), reste au firmament de mon panthéon non plus par la violence de sa musique, mais bien par la résonance qu'il créa jadis en moi et qui, en cette soirée de novembre, fait un écho assourdissant dans le silence de ma vie. Channeling the quintessence of quelque chose.

To be Limoged in Chaos, that's what happened to me some time ago, witnessing the extraordinary full display of Covenant by Morbid Fuckin' Angel. David Vincent and mastermind Trey Azagthoth are now flanked by drummer Tim Yeung and guitarist Destructhor (of Myrkskog and Zyklon fame), two beasts in their own rights (watching Destructhor bent over his guitar almost to breakpoint, windmilling as it to fly like some lovecraftian madman is a sight to be seen !). From Rapture to God Of Emptiness everything went according to the grimmest plan, meaning a full-blast attack of ripping, mineral, esoteric death metal. Following the interpretation of Covenant, the band tore through some classic shit such as you-name-it, including some gems from the mighty Tucker / Rutan era. Absolutely sick while retaining the occult, obsidian magick deeply engrained in Morbid Angel's ravenous heart.

Le site de Morbid Angel.

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L'ère Tucker, chat tue
Morbid Angel : un bon coup de pied occulte

dimanche 16 novembre 2014

Antilife

Difficile de ne pas voir, dans la mort du jeune Selim Lemouchi, une conclusion parallèle à celle choisie par Jon Nödtveidt... Car quoi qu’inspirant de très grands albums de metal plus ou moins extrême (Reinkaos...), liés dans les ténèbres par l'adoration morbide d'un bien mystérieux culte rappelant plus qu'à son tour les sectes millénaristes, ce « gnosticisme anticosmique »  est percutant dans sa définition et vertigineux dans sa vision. Le grand chaos ; tout en vient et tout y retourne ; ce qui voudrait exister par la chair (trivial véhicule de notre passage) entre ces alpha et omega n'a pas de raison d'être. Voilà en tout cas comment je perçois les fumeuses théories de ce qui n'est pas plus qu'une mystérieuse congrégation, essentiellement numérique, mais peut-être plus puissante que l'on pense. Une vision dérangeante car dérangée de la vie. Arckanum, Disiplin, Dissection, Watain pour les plus connus sont le « sonic commando » de cette obédience noire exerçant une évidente emprise intellectuelle sur ses musiciens-instruments.

Car la libération de la chair, c'est un arrachement définitif qui s'appelle la mort ; l'arrêt dysfonctionnel et terminal d'un système biologique bipède. Certain d'avoir achevé son grand-oeuvre via The Devil's Blood au point de clouer cette bouche de Satan par un communiqué laconique et définitif, envisageant sa mort comme point d'orgue de sa vie, Lemouchi aura eu une trajectoire d'étoile filante à la Jon Nödtveidt (même si celui-ci aura expérimenté la mort de diverses façons) bien regrettable au vu de l'excellence de sa musique. A tout le moins, le metal et plus largement le hard rock occulte - devant autant à Blue Öyster Cult et à Coven qu'à Mercyful Fate ou à Watain - a perdu un héraut de grande valeur ! Il est dommage que The Devil's Blood, une aventure fraternelle rarement vue dans le style, trouve sa fin artistique dans Tabula Rasa, compilation quasi post mortem au goût de fond de tiroir qui succède difficilement à The Time Of No Time Evermore et The Thousandfold Epicenter. A ré-écouter aussi, sa divine intervention sur Waters Of Ain des petits crassoux de Watain... Only Death Is Real, merde, c'était pour déconner ! Il semble qu'une frange de musiciens prennent actuellement l'assertion frostienne bien trop au premier degré.

What a pity... I'm talkin' about Selim Lemouchi's untimely passing here. The man chose to end all things after having completed a short but wondrous body of work through the mortal vehicle known as The Devil's Blood. A very, very gifted musician whose death can't be questioned but only mourned. Maybe some dark claws claimed his soul. Do not judge, lest be judged yourself. I will not know death until my time comes. Fuck it anyway, 'cause I'm half drunk, tryin' to type these lines on a fuckin' smartphone after several shots of Knockando graciously poured down my parched throat by a good friend of mine. This one is for you Selim, for this is the time of no time evermore.

lundi 2 juin 2014

Thrashers AOC

Pourquoi un slip français ? Parce que les groupes dont on va parler maintenant sont putain de burnés mec. Et putain de Français aussi ! Vive la maille normande.

Mais qu'est il arrivé à Loudblast ? Pas mauvais du tout, ce dernier-né Burial Ground, mais il est étonnamment dénué de l'esprit habituel ; cette patte de compositeurs (Buriez / Leclercq, puis Buriez) ; cette couleur que le groupe a toujours eu même sur ce produit industriel qu'était Disincarnate. J'ai torché une première écoute sur les petites enceintes minables de mon vieux PC (une machine désirante qui ne veut pas mourir, même si elle est à peine capable de faire tourner Metroid sur NES), et je me suis dit « tiens, Loudblast s'est mis au black metal ». Puis je me suis rappelé que sur lesdites enceintes, même The Wall sonne comme My Journey To The Stars. Du coup, hop ; j'ai pris le temps d'une écoute au casque plus respectueuse, celle-ci, du travail accompli. Eh bien il y a de tout, dans cet album : du death metal, oui, mais aussi du heavy et du thrash doomy. Comme la pochette l’annonçait d'ailleurs, avec son côté old school proto-black. Voir notamment Ascending Straight In Circles qui tape complètement dans un punk épico-bathorien (si. Ecoutez le morceau en entier au lieu de zapper, putain de génération Y) ! Burial Ground n'est, finalement, pas si black metal que ce qu'on a bien voulu en dire ici où là même si, j'imagine efficacement secondé par une jeune garde issue de la géhenne, Buriez a teinté de noir sa rifferie (The Path, clôture magnifique) qui conserve cependant cet accordage et ce son qu'on lui connait. Mais enfin, la patte glissée-torturée (mieux que le coupé-décalé) si caractéristique du groupe n'est pas vraiment là - c'est du reste, pour un vrai amateur de Loudblast (suivis depuis l'ultime mini-LP Cross The Threshold), une très curieuse sensation que d’écouter ce respectable et satisfaisant Burial Ground. Qui n'est donc pas le digne successeur de l'immense album précédent.

Massacra ! Sans jouer au puriste, il est presque difficile aujourd'hui de revendiquer son amour pour ces affreux dont l'heure de gloire, si elle a jamais sonné un jour, est passée depuis longtemps : à défaut de les avoir suivis de leur vivant, il peut sembler pédant de s'en être amouraché sur le tard (époque Sick Humanize Human me concernant). Un décès plus tard (Fred D.), et c'en fut fini de cette aventure qui ne prend un grand A que si on la juge à l'aune de ce que l'on appelle underground. Car au grand jamais Massacra n'a approché le succès insolent de Loudblast dont la presse avait réussi à faire des frères ennemis (le verbe est créateur...). Aujourd'hui par le biais de Century Media, utérus naturel de cette renaissance compte-tenu de la position de Jean-Marc T., ce sont les démos qui sont rééditées, avant, j'imagine, de ressortir l'artillerie lourde des albums (j'espère que les décriés mais honorables deux derniers y passeront - être en avance n'est pas toujours évident). La notoriété du groupe a toujours été entretenue avec une certaine mélancolie par ses aficionados voire plus (j'ai souvenir d'un message caché dans une pub pour Century Media), et c'est une bonne chose. Massacra était cette bête féroce à l'appétit d'ogre, entre chien et loup, qui décida de se repaître de l'Allemagne et de tenter sa chance à l'Est tandis que la France restait sourde à ses sirènes hurlantes. Il faut se (re)plonger dans ces démos furieuses, du speed-death haute-pression pas toujours en place mais dont, selon l'expression consacrée, « le charme naïf excuse les défauts de jeunesse ». La réédition Day Of The Massacra est de qualité, et vaut notamment pour l'interview du livret qui mentionne les oubliés Morsüre, brutes aujourd'hui préhistoriques dont la vélocité confinait presque à un avant-gardisme arty. Au bon souvenir de cette époque où un groupe se faisait les dents jusqu'à se trouver avant de passer à la phase album !

Just had to mention the recent Massacra reissues courtesy of Century Media. If old skull death thrashin' metal is what turns you on, you will dig Day Of The Massacra, a collection of demos once revered in the European underground. Also, I have a thought for Mr Fred D., a savage string master whose passing put the band on an eternal hiatus. Ok for the departed, on to the living : Loudblast have just released Burial Ground, a new album quite interesting and very well produced as usual. Not anywhere as good as Frozen Moments Between Life And Death (possibly the second best Loudblast output after Cross The Threshold), but nevertheless worth your money. Et voilà !

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samedi 3 mai 2014

The Will And The Way (le changement, c'est maintenant)

Excellent, excellent papier que cet article « Carving A Giant » paru dans le Terrorizer de février 2014 et dans lequel s'affirme impérialement, par la plume rapporteuse de Rob Sayce, Adam Darski. Comme l'a toujours fait cet artiste complet qui a même réussi à mettre de la superbe dans un show en carton (être juré dans l'édition polack de The Voice. Nom de dieu). A l'inverse des précédents Behemoth, litanies ravageuses dénuées de toute surprise, j'attendais The Satanist au tournant, extrêmement curieux de constater comment Darski aurait forcément transfiguré son art suite à cette maladie qui ne l'aura pas tué. Mais qui et comme toute expérience de cette importance, l'aura apparemment refondu comme humain et comme artiste, sans pourtant  rien atteindre de sa substantifique moelle (désolé d'être de mauvais goût, mais au delà d'être, quelque part, une assertion de pure vérité, c'était trop tentant). Darski brûle d'une force intérieure gigantesque et fait partie de ces créateurs qui ne façonnent pas que leur art, mais aussi leur propre pâte humaine en la conformant à une volonté d’airain guidée par une réelle Vision (« you cannot find harmony by castrating the dark part of your nature [...]. It made sense to come to terms with it »).

Pour la musique composant ce nouvel album, je ne la commenterai pas plus avant mais mes espérances ont été en partie exaucées. Je ne suis plus vraiment Behemoth depuis cette enfilade de blockbusters « nuclear-blastisés » bâtis sur les éternels mêmes éléments : prouesses de brutalité instrumentale, voix très en avant clouée sur le reste comme le christ sur la sainte-croix quitte à l'étouffer (le reste), et mélodies abusant de cette gamme orientale qui a fini par devenir un trademark éculé de Nergal (trademark ici absent). Très black metal dans l'esprit, presque watainisé par moment, The Satanist est une oeuvre écrite en lettres de sang comme d'autres l'ont été avant (De Mysteriis Dom Sathanas évidemment, dont on trouvera ici les échos des sinistres arpèges plus qu'à son tour). Un disque qui parvient à casser le moule évoqué précédemment en accomplissant l'alliage de l'éternelle dualité du metal extrême ; la brutalité et l'intellectualisme. Très comparable, ici, à l'inné et à l'acquis dont il faut parfois savoir se départir (« I used to overthink everything [...]. With creative process it's better to limit the intellectual elements so your inner voice can speak through your art »)L'interview est à lire dans Terrorizer #245, février 2014. Le titre de la notule est un hommage à Robh Ruppel, mais pas que.

The Satanist is a monster of a record. Less predictable, less self-indulgent, it even gets rid of these famous oriental-tinged melodies in favour of an ominous, very black metal feeling, unheard from Behemoth since... man, I don't even remember since when. Also, this seems to be part of kind of a personal redefinition for Nergal, but I won't dwell to much in here. Find a great, in-depth interview in its entirety in Terrorizer #245.

samedi 26 avril 2014

Contes morbides

Le black metal jugé par les vivants

L'Histoire (avec un grand H comme dans Hellhammer) se fait parfois plus black metal que le black metal et les amateurs d'anecdotes frappantes - les petites histoires faisant la grande - connaissent sûrement celle du Concile cadavérique. Pour des raisons fort éloignées de nos actuels grands problèmes politiques et sociaux, le pauvre pape Formose, déjà mort, sec comme Duff McKagan et rigide comme le cou de Tom Araya, fut exhumé pour répondre d'un crime de trahison. Les accusateurs (la noblesse italienne de la fin du neuvième siècle) lui attribuent un avocat charger de répondre à sa place (sans blague), et après avoir revêtu le cadavre putréfié d'atours pontificaux (« ça lui collait à la peau », oserai-je), décident de lui couper les doigts bénissants et de le jeter dans le Tibre plus habitué à charrier des courtisanes syphilitiques que des papes déterrés. Avant la baignade, ses habits nouvellement passés lui furent arrachés (des bouts de pape venaient avec)... et plouf, s'en fut fini du pauvre Formol - oups, Formose, qui disparut avec son cilice, sa dernière possession qu'on ne put lui ôter car trop enchâssée dans le cadavre. Dire qu'il avait toujours cru qu'il y avait quelque chose après la mort... c'était donc vrai !

Cet événement également connu sous le nom d'Horrible synode est l'un des plus lugubres qu'il me soit donné de connaître dès lors que l'on parle des histoires de l'Histoire, et à coup sûr il a dû être relaté à de nombreuses reprises sur diverses sorties black metal. Marduk, cependant et à mon sens, serait peut-être le meilleur candidat - Monsieur Håkansson étant un féru d'Histoire à prendre au sérieux - pour la raconter à nouveau (surtout depuis que le groupe, grâce à Monsieur Mortuus, s'est paré des atours les plus sinistres qu'il ait jamais connu).

Did you know about the Cadaver synod ? What a strange, utterly bleak story lurking in the darkest corners of History. I won't relate it in details here as a minimal search on the internet will tell everything you should know about this dismal case of a cadaver pope standing a post mortem trial. But come on... can things get more black metal than this ?