vendredi 21 mai 2010

Sicut Cadaver

The Apotheosis of War (Vasily Vereshchagin, 1871)

En 2010, malgré le marasme socio-économico-professionnel que nous connaissons, il en est une qui ne connaît pas la crise : si je la rencontre, ce ne sera pas, c'est sûr, dans le cadre de mon boulot. Elle fauche la scène, comme la grêle les blés. Après Peter Steele et notre vieux Ronnie (qui a connu les honneurs du canard local), après Debbie Abono (soutière du metal qui choisit, à l'âge où une dame prend censément sa retraite, de manager Exodus, Possessed et Vio-Lence) et quelques autres, voici que c'est Juhani Palomäki qui casse sa pipe (pas une news sur ce torche-cul qu'est Blabbermouth). Trente-deux ans, c'est jeune, c'est moins de moitié moins que Ronnie et je ne parle pas de l'âge canonique de Madame Abono. Cause non révélée (entre le suicide, le sida et la combustion spontanée, j'opte raisonnablement pour la première), mais effet déjà connu : un énorme coup de vieux dans les dents. Voici bien plus d'une bonne dizaine d'années que j'avais eu la chance de voir Yearning en concert avec Nightfall et SUP, et l'occasion de baragouiner quelques instants avec l'alors très jeune - mais moins que moi - chanteur-guitariste.

Yearning a sorti plusieurs albums et marcha plutôt bien en France, malgré le profil bas que s'est toujours imposé ce projet musical - difficile de parler de groupe. Parmi desdits albums, je recommande humblement With Tragedies Adorned, qui fait partie de la bande-son de mon adolescence, mais surtout Plaintive Scenes. Un album important dans la (re)construction de mes goûts, lorsque je suis passé du tout-américain aux genres et groupes plus confidentiels et « exotiques », fussent-ils du sud (Moonspell) ou du nord (Emperor). Et un disque que j'ai associé pour toujours, de façon incongrue vu son origine, à une traversée nocturne de l'Espagne. Seul éveillé dans un bus tout entier endormi filant vers Porto, mon amie d'alors calée à côté de moi, j'avais écouté en boucle ce chef-d'œuvre qui répondait à tout ce romantisme adolescent que j'avais au fond de moi. Je ne suis peut-être plus ni l'un, ni l'autre... mais amateur de Yearning, toujours. Salut l'artiste, tu es mort jeune, mais tu as fait beaucoup.

Naïveté de Yearning, le seul groupe finlandais qui savait utiliser les trémas et accents aigus dans son français.

What a sad year 2010 is – and a busy one for the reaper. Pete Steele, Ronnie Dio, Debbie Abono (an almost unknown figure whose role in the rise of American west coast thrash metal was an important one), the ‘Knot Paul Gray and other lesser-known people… It seems that wasn’t fuckin’ enough ‘cause now it’s young Juhani Palomäki’s turn to be swallowed into the void. What a pity – Yearning was a talented band criminally underrated ! Despite having never “made it” on the American market, Yearning did pretty well in Europe and especially France. I highly recommend Plaintive Scenes, the second release, which sums up everything that Yearning was : melodic yet heavy as fuck, while retaining an atmospheric and romantic touch which I call the “Finland style”. Sadly, the death of its founding member and mastermind is also the demise of Yearning.

mardi 11 mai 2010

October Dust

Pas forcément dingue de sa musique tout en reconnaissant largement ce qu'elle a apporté à notre scène (beaucoup), mais inconditionnel du bonhomme en lui-même : tel était mon rapport avec Peter Steele, qui a décidé non pas de claquer par un mois d'octobre un peu rouillé mais plutôt un bête jour d'avril 2010. La vie est conne, il le savait, nous le savons, vous le savez. La multiplication des hommages par des musiciens de tout horizon fut aussi impressionnante que celle des pains par le Christ et Peter Steele se serait contrefiché du mien autant que des autres. J'ai donc décidé, après concertation avec moi-même (nous sommes souvent d'accord), que le mieux était de lui laisser la parole une dernière fois. La sagesse de cet homme, féministe de la première heure qui disputa la guerre des « gaules » à César, était biblique - ainsi en attestent ses fulgurances post-sartriennes et autres considérations situationnistes (notamment sur la Femme et sa place - à Brooklin comme ailleurs, y'a une cuisine dans chaque maison). Enjoy, comme ils disent... :

« - You say I'm a pussy - Well I say you're what you eat

- I used to try to run five miles every other day, but I was subjected to my own thoughts for forty minutes and I couldn't stand what I thought

- I'm a big fan of the effects of alcohol

- I don't cry anymore, I just beat people up. It's a lot more fun

- Words as slut, cunt, whore, are not directed to the entire female populus : there is no better person in this world than my mother

- I don't hate women ; I hate all people equally ».


Enfin, profitons de ce billet pour une exhumation (pas celle de Peter - ça a déjà du être assez compliqué comme ça pour le mettre en boîte). Fallout, c'était le premier groupe de l'escogriffe, et il est amusant de remarquer que la plupart des choses qui allaient être développées dans Type O Negative étaient déjà là : l'humour noir, ce côté punk esthétisant assaisonné de claviers léthargiques, et cette prestance déglinguée qui devait autant au doom de Black Sabbath qu'aux substances du dealer d'en face. Josh "Taupe au Guichet" Silver jouait déjà dans ce groupe mais l'histoire ne dit pas s'il était déjà constipé (avez-vous vu ce mec essayer désespérément de chier dans un champ, dans une home video plus tordante qu'un Seinfeld ?). Pour un bête groupe de heavy metal (pléonasme), Fallout devait être plus intéressant qu'il n'y paraissait et, passée la parenthèse ignominieuse - c'est un compliment - Carnivore, Type O en fut la directe continuation. Où la preuve, une fois de plus, que rien ne pousse bien sans bonnes racines. Sur ce, laissons Peter à celles des pissenlits...

Batteries Not Included et Rock Hard, enregistrées en 1981 par Fallout.

Not wanting to sound like a pussy, but I have to admit that Pete Steele’s passing did affect me a bit – it just saddened me, really. Typo O really never was my thing but Steele was a bigger-than-life character blessed with a twisted, metal Woody Allen kind of humor – and it makes each one of his interviews absolutely priceless. As I know you like to learn things here, you can say Pete was a “pince-sans-rire” (a French idiomatic expression). One day his quotes will be compiled in a compendium and our children would have to learn it. Wouldn’t that be überkult ? By the way, Fallout is not only a video-game. It is also Pete’s pre-Carnivore band, foreshadowing in many ways the TON stuff. Give it a try instead of listening to Christian Woman for the hundredth time !!!