samedi 7 décembre 2013

Inquisition Symphony (ou comment j'ai trouvé un Grand Ancien flottant dans ma baignoire après l'écoute de OVFTM)

Inquisition... Connaissant bien ses nom et logo, je sais trop bien pourquoi je suis longtemps passé à côté de ce groupe. USBM. Pas ma came, et c'est un euphémisme. Un genre typiquement affublé d'une production hyper compressée mais baveuse comme l'encrage de vieux comics, parfois prétentieux comme pas deux (le BM canonique nord-américain n'a pas d'histoire autre que récente - comme le pays dont il émane -, il faut bien compenser et c'est souvent par l'arrogance), régulièrement lo-fi par destination comme pour se faire pardonner son insignifiance lors de l’avènement de la seconde vague... Bref, le visa USBM me fait fuir à quelques exceptions près (Leviathan, ou cette crasseuse scène urbaine à la The Howling Wind qui parvient à extirper Satan des égouts fumants de la Fifth Avenue). Si je rajoute à ça le trip ritualistico-machin-chose dédié aux Grands Anciens dérivant dans le cosmos qui me casse bien les couilles car surreprésenté, Inquisition n'avait vraiment pas ses chances avec moi. Et puis merde, j'ai déjà tellement écouté de bons trucs en « -tion »... En un mot comme en cent, j'avais catalogué Inquisition comme un duo de black metal ricain générique ; dont on passe les boîtiers à cent-à-l'heure dans les bacs sans s’arrêter une seconde. Et surtout sans se demander pourquoi, justement, on ne s'y arrête jamais. La rencontre s'est faite au gré d'errances dans le web profond, là où la lumière ne brille plus. J'ai finalement entendu Inquisition - ça m'a même donné envie de les écouter...

Je me suis procuré Ominous Doctrines Of The Perpetual Mystical Macrocosm (avec sa pochette qui pourrait figurer un boss dans les vieux Contra) et surtout le dernier éjaculat Obscure Verses For The Multiverse. Nom de dieu... J'ai fait trois fois le tour de mon slip petit bateau sans toucher les bords, les amis. C'était tellement bon que j'ai remis ça, et j'ai refait trois fois le tour de vous-savez-quoi dans l'autre sens. Si la musique c'est des maths, à l'évidence celle crachée par Inquisition est régie par des théorèmes non-euclidiens. C'est, pour commencer, un putain de déluge, mes aïeux... Absolument furibard de chez furibard, une violente expectoration de couleurs hors du chromatisme terrestre, qui déferle en un torrent mystique ravagé de spasmes slidés dégueulasses. Ce maelstrom se ventile horriblement d'arpèges saturés interdits, autant de filtres sales et granuleux qui préparent en extemporanéité les assauts suivants de cette odieuse symphonie soufflée par Erich Zann - je parlais de couleurs, mais kaléidoscope halluciné est plus approprié encore.

L'aspect rituel, avéré, est renforcé par le coassement sinistre d'une bête maussade enfantée par Abbath et le gauchiste Rob Darken - plus encore que le son, je vous laisse imaginer la scène célinienne. On pensera globalement, outre la voix et le son de guitare, à la meilleure période d'Immortal (les montagnes russes glacées d'At The Heart Of Winter, cet indétrônable bonhomme de neige), ésotérisme en plus. Inquisition, en termes d'ambiance et par les ténèbres parfois solaires qu'il exsude, se situe là où il veut exister ; cette zone grise entre true black et death rigoriste, celui qui s'écoute aux chandelles et où les baskets montantes n'ont jamais été permises (joyeusetés type Necros Christos, Teitanblood...). Pas flagrante objectivement, la furia cabalistique de Limbonic Art cinglera pourtant l'oreille de l'initié - c'est un ressenti. La consistance des guitares et l'exécution frénétique de ces circonvolutions en mode mineur trahit l'arbre généalogique duquel Inquisition s'est joliment cassé la gueule (le duo a tué sa précédente incarnation colombienne donnant dans le thrash) ; le génotype est complet.

A croire que les habituels passeurs de plats américains (je sais c'est dur), plutôt tièdes comme l'archétype vitrinesque Abigail Williams doté pourtant du même arsenal sur Becoming, ne sont là que pour cacher l'immontrable, le tératogène, l'escamoté... Je n'ai jamais douté qu'il existait un véritable BM américain, mais je n'ai jamais douté non plus le détester, hormis exceptions notoires dont Inquisition fera désormais partie. Du vrai, du très grand black metal qui honore son genre, de l'art absolument dégénéré qui, si je l'avais relativement évité jusqu'à présent, a su venir à moi.

Wow. Maybe I'm late to the game, but I just found out Inquisition were actually great. I thought they were turd just because they're yankees, see how narrow-minded I can be sometimes ? In fact, Inquisition is sooo good that I'm sure I'll exclusively listen to them for the next two weeks or so (not couting the Christmas Carols). Searching for some black metal madness, packed with occultism, rigorism, extremism (and tentacles) ? Well, the quest is over for today. Help yourself and bow to these masters of cosmic destructivism, architecturers of agression.And don't fuck around with Cthulu.

Obscure Verses For The Multiverse (Season Of Mist, 2013)

01 Force Of The Floating Tomb
02 Darkness Flows Towards Unseen Horizons
03 Obscure Verses For The Multiverse
04 Spiritual Plasma Evocation
05 Master Of The Cosmological Black Cauldron
06 Joined By Dark Matter, Repelled By Dark Energy
07 Arrival Of Eons After
08 Inversion Of Ethereal White Stars
09 Infinite Interstellar Genocide
10 Where Darkness is Lord and Death is the Beginning (limited edition bonus track)

samedi 30 novembre 2013

Satyricon exécutionne Limoges

Je n'avais encore jamais vu Satyricon sur scène, c'est chose faite (ma check list se réduit, il sera bientôt temps d'y aller...) grâce à Execution Management, véritable Monsieur Loyal Inc. des Lémovices. M. Wongraven est dans un bon soir car on sait l'élégant inégal, et l'on comprend vite que ça va bûcheronner dur et grave comme dans un discours de François Hollande sur l'inversion de la croix (du chômage). Satyricon... Une toujours féroce bestiole issue des bois de Septentrion, mangeuse de moumines à ses heures, qui tombe parfois sur une formule facile dont elle abuse sur quelques albums mais peut se targuer de ne pas en avoir commis de mauvais. A l'instar de nombreux groupes de sauvageons scandinaves de la légendaire deuxième vague, qui, bien que surpris alternativement à ronronner ou à se réinventer au mépris des dogmes, restent inspirés par un ADN profond et obsidien dont ils ne se départent pas.

Fin de la digression et retour à l'agression : ça enquille sec et dur, ça secoue les sapins comme EDF un lendemain de tempête, tout ça contremaîtrisé avec maestria par M. Wongraven qui n'oublie pas, tout bourgeois du black qu'il est, qu'il vient de là il vient du froid. On se paie donc dans la gueule, servis par une interprétation et un son énormes, des Hvite Krists Død et des Forhekset comme si les pains pleuvaient en une biblique multiplication. Tout ça rehaussé en permanence par le charisme Hugo Boss d'un Satyr venimeux, impérial et dominateur. Particularité notoire de Satyricon, on a beau opiner du chef sur des structures souvent rock sinon binaires, Frost est toujours là, derrière, bête humaine ou de somme, assommoir, montagne hallucinée derrière son kit de cuisine norvégien, passant allègrement de plans à la Phil Rudd à des brutalités tou-pa-tou-pa de derrière les fagots tout en blastant à la 1993 à la noire sans coup férir. Un véritable docteur-ès-avalanches qui tape, tape, tape jusqu'au bout de la nuit. Je ne sais pas si ce mec est autiste, dingue ou prof de math mais dans la catégorie moissonneuse batteuse, il fait du John Deere et j'adore (cette fin de phrase n'est que pure coquetterie).

Maestro parmi les maîtres, Satyr a le génie pour concocter la bonne setlist, ce qui en metal extrême comme ailleurs est pour moi une science exacte - mieux vaut un set floppy mais bien agencé qu'une série de frappes chirurgicales mal placées. Là encore plus Kadhafi (mon idole de petit garçon, mais c'est gênant à expliquer) que George Bush, Satyricon a malmené ses sujets cons pliants au gré de son diktat imparable ; tu en trouveras, lecteur, la litanie sur d'autres chroniques. Sache simplement que si Mother North (qui vire à la Fear Of The Dark, mais c'est un compliment-hommage à mes idoles sans compter qu'on aime tous pousser la chansonnette en pensant à Monica Bråten) fut habilement jetée en pâture au public, elle fut suivie avec à-propos par Fuel For Hatred, un combo comme on n'en fait plus depuis Street Fighter II (le premier évidemment - "The World Warrior". Eh oui, 1991 n'est pas que l'année des Use Your Illusions).

Raiding Europe est un bon titre de tournée, oldskull et surtout bien porté - même si Dans La Tête Yvette eut pu convenir. A voir en ville dans la vieille Europe même pour les pas-fan de Satyricon, l'album. Un concert de plus comme ça, et je me risquerai peut-être à goûter le vin du satyre cornu, tiens. Photo en tête de notule de votre serviteur.

Recently went to an amazing Satyricon gig, or should I say recently witnessed a statement of what black metal shoud be and should stay - thanks to the norwegian wolverine horde. Dark, frosty and punishing forest-scented black metal, meaning honey for the ears. And yes, Mother North is still one of the best black metal song ever spirited, a sonic embodiement of the original darkness oozing from scaldic lands during the nineties.

Le site et le Myspace de Satyricon.

jeudi 28 novembre 2013

Bof Redemption

Julien Doré ni bon ni mauvais s’est mis au black metal de pacotille et chante des trucs comme Descente d’organes et A mort tous les anges (ou un truc dissectionnien dans le genre) ; Grégory Gadebois - par ailleurs intéressant comédien ayant porté sur les planches Des Fleurs Pour Algernon - trouve ça insupportable et nous aussi et menace de lui écraser sabbath sur la tête à plusieurs reprises. D'autant plus que Grégory n'aime plus le black metal, il veut une vie pour lui loin de Satan Labite (on pense déjà « what the fuck », mais la suite ne déçoit pas).

Finalement Julien, pissant de la grenadine mayhémique par les bras pendant tout le film, s'invente un cancer et ses amis peinés et jamais trop aidés piquent un camping-car à des hollandais nudistes et hippies, enfin à des hollandais quoi (même si on dirait Saxon, promis) pour aller jouer au Hellfest. Un bio film sur l’amitié, dont rien ne sort grandi malgré le parti-pris de ne pas (trop) ridiculiser le black metal, malgré Audrey Fleurot en mode MILF, et malgré tout trop long de 90 minutes.

Just seen a very average movie loosely related to black metal. Not as bad as one could imagine, but still, it kind of sucks. We frickin' froggies have an expression perfectly fitting these kinds of things : "une improbable comédie" - just stay away from any fucking movie described as such. I guess Conan The Motherfuckin' Barbarian still is the best metal movie I have ever seen.

dimanche 24 novembre 2013

Jo Bench, Une Femme Parmi Les Bêtes

Du crust, du core - dans le bon sens du terme -, du punk abrasif et ralenti qui sent la pisse sous les bras, voilà ce qu'est Bolt Thrower. Et après, seulement après, c'est du death metal qui connaît son Petit Amebix Illustré par cœur. Et encore ensuite, c'est du death metal étiqueté Games Workshop : pauvre Bolt Thrower, qui jamais ne s'est dépatouillé de cette estampille « death pour lecteurs de White Dwarf ». Pourtant, rares sont les morceaux illustrant l'univers Warhammer même s'ils comptent parmi les meilleurs (World Eater)... Et un vieux malentendu fantasmatique datant de nos 16 ans souffle encore à l'oreille de beaucoup que les Bolters étaient des employés de GW (jette un D20 : si tu tapes un 20, la tenancière du Poney Flingué est open pour pratiquer avec toi la célèbre Saucisse de Pont-Aux-Haches. Tu prends 5 points de charisme).

Bolt Thrower, c'est aussi un tas de gauchos fascinés par l'esthétique militaro-fasciste ; des chevelus CRASSeux treillis-rangers habitués aux squats boîtes-à-grind et amateurs de pochettes guerrières - les plus belles du genre. Il me souvient d'ailleurs d'un fameux reportage paru dans Hard N' Heavy au vingtième siècle : pour la sortie de je ne sais quel album, les Bolters avaient concocté le faux rapt desdits scribouillards, tendance FARC dans les brummies. Belle époque ! Permettez-moi une digression tant qu'on est dans H N' H, mais il faut notamment se souvenir de la rubrique « And justice for all » ; un musicien au banc des accusés chaque mois. Ça donnait : « David Vincent, êtes-vous fasciste ? », ou encore : « Kerry King, êtes vous naziste ? ». Poids des mots, choc des photos... Pour en revenir à Bolt Thrower, le groupe présentait aussi une particularité de (petite) taille : une femme - l'une des seules dans ces niches musicales longtemps interdites de séjour dans les canards d'alors (qui depuis quinze ans en revanche ne vendent plus que sur l’extrême) !

Son nom : Jo Bench. Jeanne Banc, quoi (désormais vous penserez Jeanne Banc à chaque évocation de son nom : vous verrez, vous le ferez : mon pouvoir est immense). Outre la rareté de son genre dans le death metal (oublions l’exception Pays-Bas, remarquable alors par la fournée de filles qui faisaient partie de son underground : Acrostichon, Delirium...), outre sa classe naturelle de petite Gavroche britannique maniant une basse BC Rich plus grande qu'elle depuis 1987, Jo a toujours eu goût sûr et a su éviter - merci les racines punkachien - les pièges catégorie « fille du groupe ». Pas de mise en avant gratuite, pas de sessions photos lascives et malvenues (on se souvient avec embarras d'une gênante promo-session de Crematory où Katrin, vêtue de sa vertu, posait en crucifiée extatique), et pas qu'une simple bassiste effacée car Jo Bench est, par le nombre d'interviews données, la principale voix des Bolters.

Présente sur la scène death metal avant même qu'elle ne soit nommée ainsi, maltraitant sa basse entre Gavin Ward et le vocaliste du moment, Jo Bench est un peu comme Diane Fossey au milieu de ses gorilles, à la différence près que si la seconde s'est sacrifiée pour ses primates, les héroïques dadais du Bolt mourraient sûrement pour elle même si « ok, I'm the chick in the band, but the assholes still make me carry the gear ». No guts, no glory !

Well, well, well... We all know the mighty Bolt Thrower, Coventry-born death metal squad supreme. This entry is dedicated to their badass bass player Jo Bench, a woman who never gave in to aesthetic trends nor whorish promotion at a time when many did. Jo Bench : outgunned (sometimes), outnumbered (always), though never outclassed !

Le site et le Myspace de Bolt Thrower.

...et toujours :
Soldiers of Infortune, Ou Comment Bolt Thrower Peut Sauver Une Soirée Qui Avait Pourtant Fort Mal Débuté

mercredi 30 octobre 2013

Departure From The Mortals / RIP

Partir en octobre, ç'aura été l'anti-choix d'une musicienne talentueuse dont je n'étais pas fan de toutes les productions / participations, mais dont le CV est un éloquent témoignage de la scène française true black metal (triumvirat Antaeus, Vorkreist, Hell Militia) - un terme clair et précis que je préfère à l'abusif et inutilement élitiste « orthodox ». Un black metal de haute volée, invoqué-canalisé-délivré dans les règles de l'art véritable, mais auquel je préfère finalement l'autre grande référence présente sur les états de service de LSK ; les vêpres lépreuses célébrées par Secrets Of The Moon sur Privilegivm. RIP.


French bassist LSK played with and alongside many important black metal-affiliated bands, including french activists Antaeus, Vorkreist and Hell Militia, and German liturgists Secrets Of The Moon. To take one's own life shall not be judged nor commented, for it is not a choice but a call.

vendredi 3 mai 2013

Au sud du paradis / Jeff Hanneman RIP

Bien qu'écoutant déjà du metal depuis quelques petites années à ce moment-là, c'est vraiment avec Divine Intervention (1994) que je suis devenu dingue de Slayer, ce quarteron sinistre et alcoolique, vrai-faux groupe de punk comme tant de combo thrash ou black metal. Divine Intervention le bien-nommé (époque où seuls Biohazard, Machine Head, Dearly Beheaded et Fear Factory étaient épargnés par l'ostracisation américaine - donc toute puissante - du metal) est ce fabuleux premier album post-Lombardo, contempteur de l'american way of life, s'en faisant légiste méticuleux, exhumant la vilaine tête de l'autre Amérique (derrière les naïades californiennes, Kemper, Ramirez, Dahmer...) tout en abandonnant définitivement l'exclusivité satanique.

Son grain ténébreux, presque lo-fi par moment, et son iconographie légendaire (le fan scarifié sur le live concomitant) lui conserve une aura maléfique que peu sauront convoquer par la suite dans le genre thrash. Un des sommets de Slayer, avec bien sûr Decade Of Agression qui reste la meilleure introduction possible au thrash metal (Hell Awaits, ou le meilleur build-up de tous les temps !).

Divine Intervention est signé Jeff Hanneman sur cinq des dix morceaux et bien que semble-t-il mal-aimé aujourd'hui (j'ai du rater un épisode) j'en reste un fervent défenseur... Il faut le réécouter en hommage à Jeff ! Salut l'artiste.

Hey ! Jeff Hanneman is gone, seemingly for a very long time. Despite his tragic demise, extended on three long and painful years, I will remember him as the axe-wielding demon of Slayer's heyday. Not the first in charge (Hi Mr. King), nevertheless second to none !

Le site et le Myspace de Slayer.

...et toujours :
Tontons flingueurs