vendredi 18 mai 2012

Tragic Idle

Désolé pour le pénible jeu de mots, mais c'était trop tentant... et pourtant tout à fait hors de propos. Car on en connait, des groupes qui nous baladent un peu à chaque nouvelle sortie, évoquant opportunément tel ou tel album majeur de leur discographie parfois fatiguée  pour nous mettre l'eau à la bouche - et tel maitre corbeau, l'odeur alléchée, on se fait souvent avoir par ce teasing qui s'avère, trop souvent, pas très honnête. Paradise Lost vient de faire l'exact inverse : Tragic Idol, situé avec justesse par ses géniteurs entre Icon (le granit) et Draconian Times (le marbre), tient toutes ses promesses puisque c'est à mon sens et de loin la meilleure réalisation du groupe depuis ledit Draconian Times, ce qui ne nous rajeunit pas particulièrement - c'est bien en 1996 (dix-sept ans !) que l'on a entendu pour la première fois l'arpège perlé de piano qui ouvre l'un des meilleurs albums du style heavy metal / doom sauce anglaise.

Doom que je préfère, en fait ; fils valétudinaire d'un death tourmenté et d'un heavy cachexique, loin du lyrisme parfois hors de propos de certains ténors du style - une tendance, de toute façon, à jamais interdite à Paradise Lost compte-tenu de la voix de Nick Holmes. A ce sujet - et c'était déjà criant sur Icon et Draconian Times -, on ne peut s’empêcher de relever encore le timbre étonnamment hetfieldien du chanteur (voir le bonus Never Take Me Alive notamment) ! Comme d'habitude, on s'évitera un pénible track-by-track (horrible manie des magazines. J'écoute un album, putain. Pas des bouts), mais sachez que l'ambiance déclinée renvoie totalement à True Belief et autres impérissables (Colossal Rains, Ember's Fire...) sans négliger les morceaux de bravoure guitaristique chers aux shadowkings : on parle ici d'une véritable tapisserie gothique et victorienne tissée par Aedy et Mackintosh, une rifferie épique et mélancolique (Paradise Lost excelle en ce mélange pas si simple), plus polie que l'agression abrupte de l'album précédent, et qui fait fi de toute mode : après tout, un Monsieur n'a pas besoin de lire H For Men pour savoir comment s'habiller. J'aime à noter, car ce groupe vit en Paradise Lost, l'influence discrète de Sisters Of Mercy, certes moins présente que sur des albums comme Symbol Of Life - mais écoutez attentivement Tragic Idol, la chanson. Les plus nostalgiques (ou bourrins) apprécieront aussi Theories From Another World et son intro ; embardée nostalgique vers les contrées plus âpres d'où vient Paradise Lost...

En guise de conclusion, mon avis sur ce bijou est dithyrambique (et quel emballage, au fait !), d'autant que je n'ai pas été toujours tendre avec la série d'albums parue depuis le retour aux affaires de 2005 à l'exception de Faith Divides Us... Death Unites Us. Je vous dirais bien que « tant de beauté a coulé de source, et n'a rien coûté à ceux qui l'ont produite », mais il sera assurément difficile de succéder à Tragic Idol !

Sorry for the title's lame-ass wordplay - I just couldn't resist. That being said, let's be serious for "one second" : Tragic Idol is prolly the most solid body of work ever released by Paradise Lost since the Draconian Times era, and I really mean it. So gather and listen up, ye crossed doomsayers, for Tragic Idol is the new black anno 2012 : a somber jewel exuding a distant, faint light within its heart of sabbathic darkness. Which means... buy of die !

Tragic Idol (Century Media, 2012)

01 Solitary One
02 Cruelty
03 Fear Of Impending Hell
04 Honesty In Death
05 Theories From Another World
06 In This We Dwell
07 To The Darkness
08 Tragic Idol
09 Worth Fighting For
10 The Glorious End

Le site et le Myspace de Paradise Lost.

lundi 14 mai 2012

Voir Metallica et mourir


Il y a des choses à faire dans la vie : on n’est pas sur ce rocher pour rien. Il y a aussi des choses à voir : pour votre serviteur, assister à un concert de Metallica faisait partie de la liste. C’est donc fait. La grande objectivité qui caractérise ces pages dès qu’il est question des San-Franciscains sera de rigueur : (ne) comptez donc (pas) sur un live report des plus impartiaux ! Un mot sur le Stade De France, structure impressionnante et équipée de trois immenses écrans HD, chacun plus grand qu’un terrain de tennis : sans eux, je n’aurais absolument rien distingué du concert car trop loin sur les gradins (et placé au plus haut : vertigineuse impression quand on s’installe). Fin du quart-d'heure provincial...

Passons sur Gojira, à nouveau présent sur une tournée Metallica : ces mecs, dont la rifferie mécanique et métronomique doit beaucoup au jeu de Hetfield, doivent vraiment vivre un rêve éveillé. Cependant et bien que très client, impossible de vraiment apprécier : un son catastrophique m’aura contraint à bouger la tête de mémoire plus que de ressenti. J’avais l’impression d’être un de ces petits chiens en plastique à l’arrière des voitures, opinant du chef sans trop savoir pourquoi (les Japonais font ça très bien aussi). Mais entendre, plus qu’écouter, Gojira dans ces conditions n’était rien en comparaison de ce qui allait suivre… The Kills. Perplexité totale à la « what the fuck » : pourquoi eux ? Pourquoi ici ? Pourquoi cette place (j’opte pour un calcul machiavélique) ? Ce fut atroce : inutilement bruitiste (je sais la tendance noisy du groupe mais là…), et juste chiantissime, le tout desservi par un son horrible. Gros, énorme plantage de The Kills, qui n’avait rien à gagner ce soir-là : ouvrir de cette façon pour un groupe comme Metallica, c’est se donner aux lions dans une arène à l’exclusivité pourtant connue. Alison Mosshart, à qui on pincerait néanmoins bien les fesses, conclut tant bien que mal à grand renfort de doigts d’honneur adressés à une foule bien élevée et patiente, qui finit néanmoins par siffler à l’approche de l’heure fatidique. Il semble que je sois condamné aux premières parties pénibles sur les gros concerts en stade (le pire avait été atteint sur la tournée Early Years de Maiden, au Parc des Princes : j’avais du me tartiner Within Temptation, mais surtout, enfer et damnation, Dream Theater : une agonie mes amis. Une agonie)…

« Vos acouphènes ont vingt ans », proclame la bannière géante accrochée sur les flancs du stade. Vingt ans, peu ou prou, c’est bien la date de sortie (1991) de Metallica, cet album calibré pour le carton (approche quasi scientifique en la matière de Bob Rock, cf les fameux Un An Et Demi De La Vie De…) vendu à plus de trente millions d’exemplaires et qui aura propulsé Metallica à sa périhélie. Le Black Album, c’est aussi celui par lequel nombre d’entre-nous avons découvert gamins le groupe (vous vous souvenez quand vous expliquiez à vos copains que Metalloche c'est mieux que Guns ?), et c’est surtout celui qui aura clairement démocratisé le heavy metal « grand public » malgré son paradoxe (un contenu aussi noir que sa pochette en termes de paroles). Philippe Manœuvre, toujours visionnaire, n’a pas mis Metallica mais le Garage Days dans sa « discothèque idéale ». Présent ce soir-là, j’espère que cela lui aura soufflé l'idée de publier un second tome. Ou pas, en fait.

Metallica n’a plus rien à prouver depuis longtemps… Metallica n’a plus besoin d’argent depuis longtemps (sortir un machin dadaïste comme Lulu, vous pensez vraiment que c’était pour le vendre ? Si c’est le cas, think twice, think better. Idem pour la place : un groupe de cette stature, dans un tel lieu, la fait plutôt payer entre 100 et 200 euros que 65)… Je les attends, ils arrivent. Ca y est, les Saints-Pères prennent la scène. Oh putain. Ce n’est pas tout les jours qu’on assiste à une révélation mystique : je me fais l’effet d’être Paul Claudel derrière son pilier de Notre-Dame de Paris. Pour la set-list, vous la trouverez partout, mais attaquer à 200 à l’heure avec Hit The Lights, Master Of Puppets et No Remorse, ça donne le ton… Metallica est en forme, ça joue serré, et Jaymz a ressorti la veste à patches bardée de Saxon, Venom, Tank et autres Motörhead… le charisme extraordinaire de cet improbable saltimbanque redneck partagé entre le cambouis des moteurs qu’il affectionne bricoler et ses penchants pour l’art et l’essai opère et frappe : ses ouailles sont tout ouïes et la grand-messe qui s’annonce, bordel, promet le Grand Tremblement.

Le morceau de bravoure, bien sûr, c’est la célébration du Black Album après une vidéo commémorative sympathique bien que squeezant mesquinement Jason : quelle idée géniale que de l’entreprendre à rebours pour finir, avant les rappels, sur l’apothéose Enter Sandman (foule au bord de l’apoplexie) ! Le son étonnamment bon pour un stade ainsi que la bonne diction de Jaymz permettent, j’insiste, de se rendre compte de la qualité des paroles de l’album noir (Holier Than Thou, My Friend Of Misery, Sad But True, The God That Failed, Wherever I May Roam magique et pour l’occasion accompagnée d’une chouette vidéo…). On aura même bien supporté Nothing Else Matters qui, quoi qu’on en pense, reste traversée par cette fulgurance : elle invalide d’elle-même depuis vingt ans la première des critiques qu’on pourrait lui faire car, justement et loin de compter fleurette comme les dégoulinantes power-ballads de l’époque, la chanson traite de l’importance de rester soi-même sans se compromettre par rapport à ce qu’attendent les autres de vous. En clair, une ballade qui dit qu’elle vous emmerde. Joli subterfuge, non ?

Jaymz… que dire de plus ? A-t-il trouvé la fontaine de jouvence dans son jardin (qui serait sûrement classé Parcs & Forêts en France) de Marin County ? S’est-il libéré définitivement de ses mauvais génies ? Sa prestation fut impériale : vocale, instrumentale, et quel Monsieur Loyal – on avait l’impression d’être ses hôtes ce 12 mai 2012… On se serait passé des discours un peu démago (« Metallica family », on l’aura entendu un trop grand nombre de fois !), mais après tout c’était un passage obligé : ce qui choquerait, ce serait d’entendre ça de la bouche de Mortuus à un concert de Marduk. Je ne suis pas assez musicien pour juger de la prestation de Lars qui, bien qu’éreinté par beaucoup (qui certainement ne doutent pas jouer mieux que lui…), n’a pas été ridicule malgré quelques flottements sur les parties de double (One), mais ça passait à l’aise de façon générale. Reste Kirk, que je trouve toujours un peu « transparent » : la faute à son attitude limite désinvolte alors qu’il enquille quand même de sacrés soli, ou à ma faiblesse pour Hetfield dont le jeu rythmique focalise immanquablement mon attention ? Rien à dire sur Rob Trujillo : paraît qu’il faut un bassiste dans un groupe. Eh bien, Metallica a un bassiste. Blague à part, Trujillo est un monstre d’attitude, et on pressent, avec un sentiment diffus d’injustice, que Newsted est en passe d’être relégué au rang du troisième bassiste de Metallica (on oublie Mc Govney) en termes d’importance. Rude au regard des états de service impeccables de ce bon vieux Jason : le malaise entre lui et Metallica aura été permanent, couvant pendant 15 ans.

Bref, au-delà de la confirmation de l’extrême générosité du groupe (qui, je le rappelle, donne gratuitement tous ses concerts qualité soundboard sur son site), son excellente tenue sur scène rassure et promet : plus de deux heures apocalyptiques mais bon enfant pour un rêve réalisé… N’écoutez pas les pisse-froids (gageons que les Inrocks et autres prescripteurs de goûts auront vu en The Kills le principal attrait de la soirée dans le papier qu’ils écriront en se bouchant le nez) ! Car Metallica continue son miracle « Robert Hossein » permanent : faire du grand spectacle, pour le grand public, sans compromettre son art. De 7 à 77 ans, de Nothing Else Matters à Battery, tout le monde a vu son Metallica sur scène.  Judge not lest ye be judged yourself ; c’est avec Leur Sainte Parole que je conclurai cet article, encore une fois et sans surprise, d’une parfaite objectivité sur le sujet.

Un grand merci à Nicolas Gaire qui m'a permis d'utiliser ses chouettes photos pour les images placées en lien sur les noms des musiciens : retrouvez la totale ici. Les deux clichés visibles directement sont l'oeuvre de votre serviteur.

Hey friends… Just saw ‘Tallica last Saturday and believe me, ‘twas great. I mean, reeeaaally great. I just wrote an extended article ‘bout it in French so I don’t feel like translating it just for the sake of translating it but I wasn’t let down by the guys. As a commemorating gig mostly dedicated to the Black Album’s 20th anniversary, the four horsemen fiercely tore backwards into it, nailing each number down from Struggle Within to Enter Sandman. Bullet after bullet, it all went down "straight between the eyes". Baaad motherfuckers…

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vendredi 11 mai 2012

Kröße konfussion

Grosse confusion, bizarre constitution, je tire des conclusions… Attractif, illégal, supersonique, atomique, neutronique ? Pour sûr. Tout ce que vous voulez. Mais rendons à l’Armée Rouge ce qui est à l’Armée Rouge (ou aux Cosaques)… sans dénier à Helloween le talent d’en avoir fait ce qui demeure pour moi – si l’on parle de heavy metal (mon dieu) au sens le plus traditionnel du terme – l’un des hymnes indépassables de ce style. Lyrique, libertaire et passionné : un peu comme la Russie... ou à un mot près !

Helloween, only when at the peak of their action potential (I insist on that point, mind you), is one of my guilty pleasures… especially on their first outputs. Did you know “Eagle Fly Free”, hands down one of the band’s best songs, was an unashamed rip-off of military chant “The Cossaks Ride Over The Danube” ? Stay tuned for more, you bunch of uneducated fools.

Le site et le Myspace d'Helloween.

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