vendredi 24 février 2012

Thank you for the cool aid, Reverend Jim

Pour mille raisons trop évidentes pour être détaillées ici, je n'ai jamais aimé Manowar - ce groupe a toujours osé le ridicule que même Spinal Tap s'est refusé : Joey DeMaio et ses associés, car nous parlons ici d'hommes d'affaires, font parfois passer Gene Simmons pour un ascète mormon. Et c'est sans compter l'archéo-machisme sempiternel - tellement outrancier qu'il en est d'ailleurs, excusez-moi, hautement suspect - et les piteuses bravades et autres tirades lénifiantes (« et toi, es-tu prêt à mourir pour le metal ? ») qui finissent de m'éloigner depuis toujours des hommes de guerre.

Cependant tout idiot a son éclair de génie (sauf Rhapsody qui n'a que des éclairs de connerie) et Sign Of The Hammer, album tout à fait tolérable une fois les poils enlevés, cache en son coeur barbare un des rares trésors de Manowar. Guyana (Cult Of The Damned) est une chanson-fleuve évoquant la célèbre secte suicidaire de Jim Jones, une communauté baba-fascisante qui a eu la bonne idée de se rayer de la carte du monde en 1978. Perdu entre les habituels récits fantastico-guerriers chers à ManowarGuyana est un poignant message épousant le point de vue des protagonistes et victimes (consentantes ? Le mystère des sectes ne sera jamais percé) de cette affaire où une utopie communautaire et benoîte, baignée du soleil de Guyane, s'est achevée en apothéose de sang ; couronnée d'un triste show-down final durant lequel un membre du congrès américain fut flingué à bout portant.

Il est dommage que Guyana ne soit surtout connue que pour son intro de basse : la fin de Jim Jones et de son culte de buveurs de kool-aid constitue, à mon sens, un de ces évènements importants et négatifs qui clôturent souvent les décennies. A l'instar de l'assassinat de Sharon Tate qui sonna le glas des insouciantes sixties, l'affaire du Temple du Peuple referme définitivement la porte des années soixante-dix et ouvre celle des années quatre-vingts, plus sombres, plus froides (vous voyez une autre décennie plus propice à l’avènement de la new wave, vous ?), et pourtant, malheureusement, simple prélude à la suite. Par les mots de Joey DeMaio, Eric Adams questionne la folie de Jim Jones et celle du monde : une chanson émouvante, désespérée, inespérée aussi de la part de Manowar.

All right, all men play on ten. I know that (myself, I play on 11, like fuckin' Tufnel). That being said, Manowar is also capable of writing good tunes amongst their goofy songs about how an axe in a head sounds great. Guyana is one of them, dealing with mass-murderer Jim Jones and his apocapyptic, crazy-as-fuck cult of followers known as the Temple of the People. Good riddance, Jim, and thank you for the cool Mano song. I hope you'll be doing better next time.

Le site et le myspace de Manowar.

vendredi 17 février 2012

Reich morbide

Le black metal au sens où je l'entends - et comme je l'entends au sens propre - n’est pas fait pour être beau ; d'esthétique il ne connaît que celle du chaos ; invertie et non-euclidienne ; rejetée par nature et par destination. Le black metal est un cadavre qui vit encore, un cancéreux en phase terminale qui ne mourra jamais et qui en a la superbe assurance, parfois la morgue : un éclair méchant au fond de ses prunelles putréfiées nous en donne régulièrement la preuve pour peu qu’on sache le trouver et l'écouter. Le black metal n'a rien d'une statue marmoréenne, laissant cela à ses cousins bien portants que sont le death puissant et victorieux ou le doom séculaire figé dans son hiver ; tout au contraire il est un transi asticoté, abscons et contrefait ; sa chair bleuie n’effraie peut-être plus grand-monde mais continue à provoquer hauts-le-cœur et malaise : vermoulue et spasmatique, le pus qu’elle exècre est pour certains, un nectar. Les repères esthétisants n’ont plus cours, car il leur échappe : les références sont déplacées et le sommet devient le fond comme l’éructe Vorphalack dans l'incantation lugubre qu’est Ceremony of Opposites. La crasse et la pisse maculent son ignoble corps dont la chétivité continue de surprendre – à l'inverse du death metal qui se manifeste dans la démonstration de force ; le black metal cultive le vice et rampe sournois dans la fange qui le nourrit et dans sa plus totale déréliction, il ne se laisse entendre qu’à l'état de glaire auditive telle l’horreur liquide coulée sur MoRT, ainsi régurgitée ponctuellement par certains de ses plus misérables hérauts.

Cet immondice musical n’est pas fait pour être compris et d’ailleurs, n'aime pas à s’expliquer ; restant pantois devant la piteuse littérature prétendument analytique produite actuellement à son envers ; préférant être subi ou apprécié généralement sans milieu ni demi teinte – comme toute forme d’expression extrême il a quelque chose d’une déclaration de guerre intime et en provoquera beaucoup ; dont quelques-uns seulement sauront capituler et s’abîmer dans son adulation (voire sa reproduction) comme je l’ai fait avec Samael, Emperor, AbigorOccultImmortal, Mayhem, Marduk et tant d’autres voici maintenant quelques lunes. Le black metal n’a jamais été musique mais avant, toujours, état d’esprit et survit traîtreusement dans la tête de ceux qui ont su l’accueillir une nuit - il meurt passagèrement mais existe toujours et bien qu’écoutant tant de choses différentes aujourd’hui, avec parfois du soleil et des couleurs, demeure pour moi une silencieuse et bruyante énigme qui continue à se faire, par-delà les années, son propre et sinistre écho. Récemment révélés ; Ondskapt (Arisen From The Ashes), Arckanum (Helvìtismyrkr), Saturnian Mist (Gnostikoi Ha-Shaitan).

Hard to find, these days, your dose of real black metal as you want it to be - amongst masses of uniformly played-and-produced records, though, it still lives. Crude and raw, foul smelling and evil sounding, that's how I love it to be - sometimes horror intertwines itself with an elegant form of cadaveric, hurling beauty and to me, that's what black metal is all about - definitely one of the strangest and strongest forms of artistic expression found on this side of the world.

...et toujours :