Cette célèbre phrase extraite de la Divine Comédie est on ne peut plus appropriée pour situer d'emblée la teneur de ce nouveau Celtic Frost, attendu comme le messie par certains mais redouté, en cas de retour raté, par à peu près tous. Ce n'est absolument pas le cas... Après une parenthèse d'une quinzaine d'années, Tom G. Fischer et Martin Eric Ain nous livrent rien de moins qu'une nouvelle évangile écrite en lettres de sang, une pièce maîtresse du metal contemporain de laquelle est absente, donc, la moindre lueur d'espoir. Inutile de revenir sur le passé glorieux de Celtic Frost, précisons simplement que Monotheist est totalement moderniste et avant-gardiste en cela qu'il jette avec parfois beaucoup d'audace de nouvelles bases pour le dark metal, tout en conservant des racines charbonneuses profondément ancrées dans l'identité du groupe suisse.
Refusons-nous à faire un track by track stérile et sans intérêt : dissocier individuellement les morceaux de Monotheist n'aurait aucun sens. Monotheist, c'est avant tout un manifeste, une profession de foi alternativement gémie, criée, chantée, vomie par un Tom G. Fischer absolument impérial et qui confère à nouveau ce côté très « dominateur » à la musique de Celtic Frost. On est assez loin du proto-black (rien d'autre que du thrash morbide, finalement) pratiqué sur les premiers albums. Les guitares sont excessivement lourdes, le tempo est volontiers modéré malgré quelques accélérations thrashisantes (Ain Elohim), l'atmosphère est à la peine, au recueillement mais aussi à la colère : il est parfaitement clair que l'objectif - largement atteint - de Celtic Frost était de reconquérir un trône perdu depuis longtemps. Notons l'excellente prestation de Franco Sesa à la batterie : son jeu est inspiré, sobre et inventif, on décèle de rares passages presque tribaux suggérant parfois l'idée d'un « culte » païen célébré par quelque étrange peuplade oubliée - de celles que l'on trouverait chez Lovecraft plutôt que chez Lévi-Strauss. Doom ? Death ? Dark ? Black ? Oui, quatre fois oui, mais avant tout unique.
Monotheist est un album qui fait peur et qui n'a besoin pour cela d'aucun artifice : en d'autres termes, on est loin du folklore habituel. Le sentiment prégnant d'écouter une œuvre « adulte » enfantée par des « adultes » ayant particulièrement réfléchi à leur art perdure pendant les soixante-huit terribles minutes de l'album. Monotheist écrase, pilonne, traumatise son auditeur. Ce bloc de noirceur ultra-dense se refuse catégoriquement à ne laisser filtrer ne serait-ce qu'un infime rayon de soleil... Ce qui n'empêche pas Celtic Frost de conserver son lyrisme et sa beauté froide habituelle : au milieu des riffs pachydermiques, des saillies bruitistes et de la plainte morbide de Tom G. Fischer bat le cœur du groupe - un lyrisme certes froid comme une nuit d'hiver, mais néanmoins beau comme la lune et ses tristesses (cf Into the Pandemonium). Mentionnons notamment, outre la fabuleuse pièce finale Winter, cet extraordinaire morceau qu'est Obscured et dans lequel se mêlent, en une sublime complainte désincarnée, le râle de Fischer et la supplique de Simone Vollenweider. Monotheist est un tombeau, sépulcral et quasiment « sacré » par instants... Mon amie absolument profane en matière de metal ne m'a-t-elle pas dit, à l'écoute de ce disque, « dis-moi, c'est presque religieux, ça ! » ?
Monotheist est un rêve expressionniste, certes froid et obscur, mais décidément loin du cauchemar redouté par certains. Un album historique, à côté duquel le My Dying Bride époque The Angel and the Dark River passe pour la Bande à Basile. Ne fêtons donc pas ce coup de maître(s), préférons observer une minute de silence bien plus adéquate en l'honneur du grand retour de Celtic Frost !
Fifteen years of waiting – but it was worth it, for Monotheist is an astonishing second coming. More, it is an instant classic, a new landmark in dark metal music. Will Celtic Frost finally reclaim the place its rocky history prevented him from keeping ? Monotheist is a slow-pace grinder, diffusing its utter darkness in an artsy, almost german-expressionism kind of way – the Frosty way. Its music is heavy as fuck, with low-tuned guitars supporting Fischer’s commanding voice and backed by Franco Sesa’s monstrous, in some cases almost ethnic-coloured, drums and percussions. A storming piece of miserable darkness it is indeed. Complete with an almost religious feeling – a requiem, that is – Monotheist does not contain one second of optimism and is the perfect embodiment of the band’ spirit. Hear its winter-scorched, blackened heart pulsing in Obscured ! To buy or to die in eternal doom and gloom.
Monotheist (Century Media, 2006)
01 Progeny
02 Ground
03 Dying God Coming into Human Flesh
04 Drown in Ashes
05 Os Abysmi Vel Daath
06 Obscured
07 Domain of Decay
08 Ain Elohim
09 Totengott
10 Synagoga Satanae
11 Winter: Requiem/Chapter Three: Finale
Le site et le Myspace de Celtic Frost.
Refusons-nous à faire un track by track stérile et sans intérêt : dissocier individuellement les morceaux de Monotheist n'aurait aucun sens. Monotheist, c'est avant tout un manifeste, une profession de foi alternativement gémie, criée, chantée, vomie par un Tom G. Fischer absolument impérial et qui confère à nouveau ce côté très « dominateur » à la musique de Celtic Frost. On est assez loin du proto-black (rien d'autre que du thrash morbide, finalement) pratiqué sur les premiers albums. Les guitares sont excessivement lourdes, le tempo est volontiers modéré malgré quelques accélérations thrashisantes (Ain Elohim), l'atmosphère est à la peine, au recueillement mais aussi à la colère : il est parfaitement clair que l'objectif - largement atteint - de Celtic Frost était de reconquérir un trône perdu depuis longtemps. Notons l'excellente prestation de Franco Sesa à la batterie : son jeu est inspiré, sobre et inventif, on décèle de rares passages presque tribaux suggérant parfois l'idée d'un « culte » païen célébré par quelque étrange peuplade oubliée - de celles que l'on trouverait chez Lovecraft plutôt que chez Lévi-Strauss. Doom ? Death ? Dark ? Black ? Oui, quatre fois oui, mais avant tout unique.
Monotheist est un album qui fait peur et qui n'a besoin pour cela d'aucun artifice : en d'autres termes, on est loin du folklore habituel. Le sentiment prégnant d'écouter une œuvre « adulte » enfantée par des « adultes » ayant particulièrement réfléchi à leur art perdure pendant les soixante-huit terribles minutes de l'album. Monotheist écrase, pilonne, traumatise son auditeur. Ce bloc de noirceur ultra-dense se refuse catégoriquement à ne laisser filtrer ne serait-ce qu'un infime rayon de soleil... Ce qui n'empêche pas Celtic Frost de conserver son lyrisme et sa beauté froide habituelle : au milieu des riffs pachydermiques, des saillies bruitistes et de la plainte morbide de Tom G. Fischer bat le cœur du groupe - un lyrisme certes froid comme une nuit d'hiver, mais néanmoins beau comme la lune et ses tristesses (cf Into the Pandemonium). Mentionnons notamment, outre la fabuleuse pièce finale Winter, cet extraordinaire morceau qu'est Obscured et dans lequel se mêlent, en une sublime complainte désincarnée, le râle de Fischer et la supplique de Simone Vollenweider. Monotheist est un tombeau, sépulcral et quasiment « sacré » par instants... Mon amie absolument profane en matière de metal ne m'a-t-elle pas dit, à l'écoute de ce disque, « dis-moi, c'est presque religieux, ça ! » ?
Monotheist est un rêve expressionniste, certes froid et obscur, mais décidément loin du cauchemar redouté par certains. Un album historique, à côté duquel le My Dying Bride époque The Angel and the Dark River passe pour la Bande à Basile. Ne fêtons donc pas ce coup de maître(s), préférons observer une minute de silence bien plus adéquate en l'honneur du grand retour de Celtic Frost !
Fifteen years of waiting – but it was worth it, for Monotheist is an astonishing second coming. More, it is an instant classic, a new landmark in dark metal music. Will Celtic Frost finally reclaim the place its rocky history prevented him from keeping ? Monotheist is a slow-pace grinder, diffusing its utter darkness in an artsy, almost german-expressionism kind of way – the Frosty way. Its music is heavy as fuck, with low-tuned guitars supporting Fischer’s commanding voice and backed by Franco Sesa’s monstrous, in some cases almost ethnic-coloured, drums and percussions. A storming piece of miserable darkness it is indeed. Complete with an almost religious feeling – a requiem, that is – Monotheist does not contain one second of optimism and is the perfect embodiment of the band’ spirit. Hear its winter-scorched, blackened heart pulsing in Obscured ! To buy or to die in eternal doom and gloom.
Monotheist (Century Media, 2006)
01 Progeny
02 Ground
03 Dying God Coming into Human Flesh
04 Drown in Ashes
05 Os Abysmi Vel Daath
06 Obscured
07 Domain of Decay
08 Ain Elohim
09 Totengott
10 Synagoga Satanae
11 Winter: Requiem/Chapter Three: Finale
Le site et le Myspace de Celtic Frost.